Alors que la 34e édition de la compétition débute en Côte d'Ivoire, nombreux sont ceux qui pensent que ce phénomène pourrait se poursuivre.
Les raisons de ce phénomène vont des problèmes d'infrastructure aux problèmes financiers, politiques et socioculturels.
Les problèmes d'infrastructure sont liés au fait que de nombreux pays africains ne disposent pas des infrastructures appropriées et nécessaires pour attirer les touristes et les amateurs de football de tout le continent.
Les pays africains ne sont pas reliés par des lignes ferroviaires qui pourraient faciliter les déplacements et offrir une connectivité. Les Africains n'ont donc pas d'autre choix que de prendre l'avion pour se rendre dans les pays d'accueil. C'est là que les questions financières entrent en jeu, car les billets d'avion sont généralement très chers pour l'Africain moyen.
Par exemple, si un Algérien souhaite se rendre en Côte d'Ivoire pour la prochaine CAN, un aller-retour d'une semaine coûtera au minimum 146 000 dinars algériens. Le salaire minimum en Algérie à partir de 2023 est de 20 000 DZD/mois.
Outre les facteurs susmentionnés, il convient de mentionner que les facteurs socioculturels, sous la forme d'une perception collective, jouent également un rôle.
En général, de nombreux Africains voyagent rarement dans des pays africains différents du leur. Cela s'explique par la géographie et les infrastructures du continent, mais aussi par la question des restrictions en matière de visas.
Un rapport de 2018 de l'Union africaine a révélé que les Africains peuvent se rendre sans visa dans seulement 22 % des autres pays africains. Six ans plus tard, cette statistique n'est toujours pas dépassée. Par conséquent, un Algérien ne connaîtrait pas beaucoup la Côte d'Ivoire, pas plus qu'un Brésilien ne connaîtrait le Paraguay ou l'Équateur en Amérique latine.
De plus, comme le continent souffre régulièrement d'instabilité politique et de difficultés économiques, les perceptions négatives et les idées fausses s'accumulent généralement. Par conséquent, même les Africains financièrement capables ne sont pas motivés à l'idée de voyager derrière leur équipe nationale.
Lorsque le tournoi était organisé par un pays spécifique, les habitants des pays voisins et familiers se déplaçaient et venaient soutenir leur équipe nationale.
Le meilleur exemple de ce phénomène est d'ailleurs assez récent. Lors de la CAN 2019 en Égypte, la finale entre l'Algérie et le Sénégal a attiré 25 000 personnes, soit la plus forte affluence du tournoi si l'on ne tient pas compte des rencontres de l'équipe nationale égyptienne.
La majorité de ces 25 000 supporters étaient des Algériens, un peuple qui connaît bien l'Égypte et qui vient d'une autre nation nord-africaine et arabe.
Pour vérifier cette hypothèse, il suffit de regarder l'affluence des Algériens lorsque le tournoi a été déplacé au Cameroun trois ans plus tard. Pratiquement aucun supporter algérien n'a assisté au tournoi.
Il est vrai que la raison pour laquelle de nombreux Algériens ont afflué en Égypte en 2019 était le succès de leur équipe nationale en finale. Cependant, il est très peu probable qu'il en aurait été de même si l'Algérie avait atteint la finale lors de l'édition organisée au Cameroun.
Lorsque de tels facteurs empêchent les fans de football africains de voyager derrière leurs équipes nationales à travers le continent, il ne reste plus que la population locale du pays hôte pour assister au tournoi, et généralement, les habitants du pays hôte se déplacent surtout pour regarder leur équipe nationale.
Une fois de plus, un exemple récent de ce phénomène a été la CAN 2019 en Égypte, où les matchs de l'équipe nationale égyptienne ont attiré plus de 70 000 personnes, alors que la plupart des autres matchs ont attiré moins de 10 000 spectateurs, avec une moyenne de 5 000 personnes selon Africanews.
Cependant, le prix des billets pose également un problème et fragmente davantage le nombre de personnes qui pourraient assister aux matchs, car de nombreux locaux n'ont pas les moyens d'acheter des billets pour les rencontres.
Selon le journal Nigerian Guardian, les billets pour la CAN 2019 ont été vendus entre 4 300 et 53 700 nairas nigérians pour les matchs de l'Égypte et entre 2 150 et 10 740 nairas pour les autres matchs, dans un pays où le salaire minimum est de 62 292 nairas.
En résumé, les questions infrastructurelles, politiques, administratives, financières et même socioculturelles constituent des obstacles pour attirer les amateurs de football de tout le continent pendant la CAN.
La population du pays hôte est donc le seul public disponible pour les matches du tournoi. Cependant, le prix des billets ne permet pas à toutes les classes de la société du pays hôte d'assister aux matchs.
Cette situation pourrait perdurer lors de la 34ème édition de la CAN.
Pour inverser la tendance, il faudrait un changement radical des infrastructures et de la qualité de vie sur le continent, ce qui est peu probable dans un avenir proche. Toutefois, la réduction du prix des billets d'avion et des billets de match pourrait permettre d'assister à une CAN plus vivante et plus animée.
L'auteur, Yahya Habil, est un journaliste libyen indépendant spécialisé dans les affaires africaines. Il travaille actuellement avec un groupe de réflexion au Moyen-Orient.
Avertissement : Les opinions exprimées par l'auteur ne reflètent pas nécessairement les opinions, points de vue et politiques éditoriales de TRT Afrika.