Par Jean Charles Biyo’o Ella
TRT Afrika - Yaoundé, Cameroun
Le centre artisanal de Yaoundé présente fier allure. L’édifice implanté en plein cœur de la capitale reçoit davantage de visiteurs. Dans sa gamme diversifiée de produits, on y retrouve : des statuettes forgées dans les régions traditionnelles de l’Ouest et du Nord Cameroun, des toiles qui retracent des sociétés ancestrales du pays, des tapis à base des feuilles de raphia tissés à la main, de la poterie fait à l’argile, de la bijouterie etc.
Des produits destinés à la consommation courante, mais aussi au marché du tourisme.
Un peu partout dans la ville de Yaoundé, le secteur de l’ameublement et de la vannerie sont aussi en pleine essor. Des salons en rotin par-ci, des meubles en bois massif par là.
Des petites PME tenues pour la plupart, par des petites mains. Des véritables opportunités d'emplois et de revenus, qui favorisent le développement économique et la réduction de la pauvreté.
Selon le Gicam, le groupement patronal du Cameroun, le secteur des PME représentent 95% du tissu économique national, même s’il ne contribue qu’à hauteur de 36% du PIB.
Les séquelles de la Covid-19
La crise sanitaire à coronavirus a plombé plus de 80% des PME camerounaises.
Une étude réalisée par le ministère des petites et moyennes entreprises, de l’économie sociale et de l’artisanat en 2021, révèle que ce secteur tertiaire qui représente plus 51% du PIB et qui emploie 42% de là de la main d’œuvre active a été le plus touché. Une chute drastique qui a entrainé la réduction de 70% du pouvoir d’achat.
Selon les chiffres officiels, plus de 68% d’employés ont été mis en chômage technique, tandis que 58% des entreprises ont temporairement arrêté leurs activités.
"La situation a été très difficiles pour nous. La clientèle était devenue rare, les produits ne se vendaient plus", explique Augustin Tongoua, un vannier installé sur un trottoir.
"Avant la crise sanitaire, je pouvais vendre quatre à cinq meubles par semaine. Mais lorsque cette maladie est arrivée, tout s’est effondré. Je passais parfois une semaine sans vendre. A un moment, j’ai été obligé de libérer les trois employés avec qui je travaillais. Je ne pouvais plus les payer. Mais aujourd’hui, ça va de plus en plus mieux. Je les ai rappelés pour reprendre le travail", confie Olivier Amougou un jeune sculpteur.
Dans son petit atelier situé derrière sa maison au quartier Mvog-Mbi dans le sud de Yaoundé, l’artisan de 35 ans ponce un masque en bois qu’il s’apprête à exposer.
"Certes que l’argent est rare, mais je fais un bon chiffre d’affaire par mois. Mais je ne vous le donnerais pas", lance-t-il en souriant à gorge déployée.
Deux milliards de FCFA pour relancer le secteur
Au plus fort de la crise sanitaire en 2020, le chef de l’Etat camerounais a mis sur pied, un ‘‘Fonds Spécial de Solidarité Nationale’’, pour lutter contre le coronavirus et ses répercussions économiques et sociales.
Doté d’un montant culminé de 180 milliards de FCFA à la suite du Collectif budgétaire, l’enveloppe a servi de bouffée d’oxygène pour plusieurs secteurs, dont celui des PME, l’économie sociale et l’artisanat. Deux milliards de FCFA ont été alloués pour soutenir les entrepreneurs et entreprises à fort potentiel sinistrées à hauteur de 1,5 milliards de FCFA, ainsi que les sociétés coopératives fabriquant des masques artisanaux et des gels hydro-alcooliques à hauteur de 500 millions de FCFA.
Mais pas assez pour redresser un secteur aussi éprouvé qui souffrait déjà d’une carence en formation et en organisations avant la covid.
"Le ministère des PME a signé en 2016, une convention avec le Feicom qui est la banque des communes, pour la mise en place des bureaux d’enregistrement dans toutes les mairies du Cameroun. L’idée est d’assurer en douceur, la migration des artisans, du secteur informel vers le formel", explique Hervé Nkoa, le Chef service du Fichier à la direction des Petites et moyennes entreprises.
Mais le responsable regrette le fait que les artisans refusent de payer des impôts. Toute chose souvent difficile pour l’Etat, de les accompagner.
"S’il faut bénéficier d’un marché public, la première pièce qu’il faut joindre au dossier, c’est l’état de paiement de ses impôts. Et lorsque vous n’êtes pas à jour, il est difficile de gagner un marché", précise-t-il.
Pour lui, l’Etat a à cœur d’accompagner les camerounais, qui font par exemple dans l’ameublement afin de ne plus importer ces produits.
Le Cameroun compte un peu plus de 40 000 artisans repartis dans les 10 régions du pays. Une quarantaine d’organisations et pas moins de 300 groupes et associations.