Par Mohamed Touzani
TRT Afrika - Rabat, Maroc
Le secteur touristique, qui joue un rôle de premier plan dans l’économie du Maroc en employant directement 550.000 personnes, soit 15 % de la population active totale, a enregistré une forte relance durant les deux dernières années après avoir été durement impacté par la pandémie de la Covid-19.
"Notre vision est de doubler le nombre d’arrivées à 26 millions de touristes à horizon 2030. D’ici là, notre objectif est d’atteindre 17,5 millions de touristes en 2026, de générer 120 milliards de dirhams (12 milliards de dollars) de recettes de voyage en devises et de créer 200.000 emplois directs et indirects", a déclaré à la presse la ministre du Tourisme, Fatima-Zahra Amor.
Selon la ministre, "Entre 2010 et 2019, le Maroc n’a attiré que 3,6 millions de touristes supplémentaires, contre 8 pour la Croatie, 10 pour le Portugal, 16 pour la Grèce et 19 pour la Turquie. Le temps est venu de sortir de notre torpeur et de faire preuve de plus d’ambition et d’audace si nous voulons jouer dans la cour des grands".
"Le gouvernement et les professionnels travaillent ensemble depuis deux années sur une nouvelle “feuille de route" pour le tourisme, à même de positionner le Maroc parmi les plus grandes destinations mondiales.
Et la barre est placée très haut.
Une feuille de route ambitieuse pour doubler le nombre des arrivées touristiques
Cette nouvelle feuille de route fixe un objectif intermédiaire de 17,5 millions d’arrivées touristiques en 2026, soit une croissance de 10% par an, la création de 200.000 emplois supplémentaires et la mobilisation de 120 milliards de dirhams de recettes.
Pour atteindre cet objectif très prometteur, une offre structurée autour de plusieurs filières thématiques sera mise en place et un budget de 6 milliards de dirhams (6 milliards de dollars) sera mobilisé pour accompagner la mise en œuvre des différents mécanismes et diapositifs de cette nouvelle politique volontariste.
Neuf filières thématiques seront ainsi développées pour répondre aux nouvelles demandes des touristes, notamment: "Ocean Waves" pour les sports nautiques, "Nature Trekking and Hiking" pour le tourisme vert, "City Break" pour les courts séjours urbains, "Beach&Sun" pour l’offre balnéaire, "Desert & Oasis Adventure" pour les escapades dans le désert, le tourisme d’affaires pour les événements professionnels, les circuits culturels pour les expériences immersives, le bord de mer pour le tourisme interne estival, et nature et découverte pour des expériences plus adaptées aux touristes locaux.
"Ces filières reflètent les marchés matures au Maroc et mettent en avant le potentiel naturel et les spécificités authentiques du pays, et nous allons leur donner tous les moyens de se développer", a-t-elle assuré.
D’autres filières visant à valoriser le patrimoine immatériel du Maroc seront également développées. Celles-ci incluent la gastronomie et les produits du terroir, les festivals et moussems, le développement durable, l’artisanat et le savoir-faire local, ainsi que l’hébergement alternatif responsable et authentique.
Doublement des liaisons domestiques et internationales
L’aérien étant le levier de tout développement du secteur touristique, le gouvernement s’est engagé à œuvrer pour le doublement des liaisons domestiques et internationales, à travers notamment un plan d’aide à la compagnie nationale Royal Air Maroc pour le renforcement de sa flotte, et la diversification du partenariat avec les compagnies aériennes low cost.
L’objectif est de doubler la capacité des sièges d’ici 2030, pour la faire passer de 14 millions à 28 millions.
L’aérien est la porte d’entrée du Maroc. 85% des arrivées en 2019 se sont faites à travers l’aérien, ce qui fait du Maroc quasiment une destination insulaire", a fait remarquer le directeur général de l’Office national marocain du tourisme (ONMT), Adil El Faker.
Cet établissement public a conclu en 2023 des partenariats avec 10 compagnies aériennes pour l’ouverture de 35 nouvelles lignes aériennes desservant 8 destinations marocaines.
Le Maroc a également signé des accords avec le voyagiste AllTours couvrant les saisons été 2023 et hiver 2023-2024, avec un objectif de 10.000 clients au départ du marché germanique, et avec TUI Group couvrant les 5 prochaines années, allant de la saison été 2023 à l’hiver 2027-2028, et permettant de doubler leurs arrivées touristiques vers le Maroc avec un taux de croissance de l’ordre de 220%.
"Aussi, nous continuerons de renforcer nos efforts de promotion à travers la campagne +Maroc, Terre de Lumière+ dans les principaux marchés émetteurs. Sans oublier le momentum exceptionnel que connait notre pays en ce moment à l’international et dont nous récolterons les fruits tout au long de l’année 2023", a ajouté la ministre du Tourisme.
La Royal Air Maroc, qui se remet de la grave crise sanitaire durant laquelle les liaisons aériennes ont été suspendues durant plusieurs mois, est au cœur de ce dispositif, mais le pavillon national connaît des difficultés financières qui freinent ses ambitions.
C’est pour cette raison que l’Etat a décidé d’augmenter sa participation dans le capital de la RAM et l’argent frais apporté par les pouvoirs publics devra servir à quadrupler la flotte aérienne qui passera de 50 appareils actuellement à 200 appareils au cours des 15 prochaines années.
La RAM va également ouvrir de nouvelles destinations internationales et renforcer son trafic domestique par la mise en place de 46 nouvelles dessertes.
Outre le renforcement de l’aérien et la conclusion de partenariats stratégiques avec les plus grands tour-opérateurs et voyagistes mondiaux, il s’agit aussi de stimuler l’investissement dans l’animation, consolider l’offre hôtelière et promouvoir le capital humain pour améliorer la qualité de service et augmenter le taux de retour des touristes.
Pour piloter cette stratégie tous azimuts et assurer une gouvernance de la feuille de route, une commission ministérielle du tourisme, présidée par le Premier ministre, sera mise en place.
Des mesures saluées par les professionnels
Le lancement de cette feuille de route a été accueillie avec enthousiasme par les professionnels du secteur.
"Cela fait longtemps que l’on milite pour que ce secteur, qui fait vivre plus de 2,5 millions de Marocains soit enfin considéré comme une véritable locomotive de l’économie marocaine. Nous en rêvions", a déclaré le président de la Confédération nationale du tourisme (CNT), Hamid Bentahar, qui n’hésite pas à qualifier ce moment "d’historique".
Le secteur du tourisme au Maroc a connu une reprise soutenue depuis la fin de la pandémie de la Covide-19 et la levée des restrictions sanitaires, avec une hausse des arrivées et des recettes en devises record de 91.3 milliards de dirhams (9 milliards de dollars), soit une progression de 16 % par rapport à 2019.
L’impact du séisme qui a frappé début octobre la région de Marrakech, première destination touristique du Royaume, a été très limité et le secteur s’apprête à boucler l’année 2023 en apothéose.
Ainsi, le flux des arrivées touristiques a atteint 12,3 millions à fin octobre 2023, en progression remarquable de 39% par rapport à une année auparavant.
La ministre du Tourisme s’est réjouie de cette dynamique très positive du secteur. "Nous venons de franchir la barre des 12 millions de visiteurs en 2023, et ce malgré les défis rencontrés après le séisme d’Al Haouz. Ces réalisations nous confortent dans les efforts déployés par notre pays en termes de promotion et diversification des marchés émetteurs", a-t-elle déclaré.
"Nous sommes sur la bonne voie pour une année record à 14 millions de touristes", a poursuivi la ministre, appelant l'’ensemble de l’industrie à garder le cap pour atteindre les objectifs de la feuille de route tracée pour le secteur à l’horizon 2030.