Sur un mur d'une école primaire du quartier populaire Zahrouni, banlieue ouest de la capitale Tunis, un groupe de jeunes s'affairait à apporter des outils de dessin pour exprimer, dans un style artistique attractif, sa solidarité avec la cause palestinienne et à tous les ayants droit légitime.
La jeunesse du quartier tunisien a choisi de dessiner des symboles de la résistance palestinienne et arabe en général, de marquer leur soutien au peuple de la Bande de Gaza et de souligner que la blessure est la même, malgré les distances.
Abou Ubaida à Zahrouni
Muhammad Ashraf Al-Shaabani, membre de l'association "Pensée culturelle" (une organisation indépendante active dans le quartier Zahrouni), a confié à Anadolu que l'idée avait commencé avec Hassan Al-Warghi, un artiste graffeur originaire du quartier, lorsqu'il s'était accordé avec les riverains de la place sur la nécessité d'utiliser ce type d'art pour soutenir la résistance palestinienne en tant que mouvement.
Et les jeunes du quartier de s'y mettre pour réaliser une fresque murale utilisant l'art des graffs sur le mur de l'école du "18 janvier" à Zahrouni, avec l'assistance d'une administration locale.
Al-Shaabani a ajouté : "Nous avons annoncé notre soutien à la cause palestinienne à travers cette œuvre dans laquelle les drapeaux palestinien et tunisien apparaissent ensemble, ainsi que des dessins d'Abou Ubaida, des Brigades Al-Qassam et bien d'autres symboles de la résistance".
Il a également souligné que tous les habitants du quartier "contribuaient à la réalisation de ces travaux afin qu'ils puissent admirer une belle vue".
L'artiste qui a supervisé les travaux, M. Ouerghi, a expliqué à Anadolu qu'il avait réalisé ce travail "pour embellir la ville et pour soutenir le peuple palestinien dans ses souffrances, alors que des enfants et des femmes sont tués".
Se tenant devant le tableau, il a ajouté : "Le sujet de la fresque aborde la question de la défense du droit depuis l’époque du Prophète jusqu’à Mohamed Zouari (un ingénieur tunisien à l’origine des drones du Hamas)".
Et Ouerghi de poursuivre : "Nous émettons un message aux dirigeants arabes : Nous, les habitants des quartiers populaires de Tunisie, sont aux côtés de la Palestine, de cœur à cœur".
L'art contre l'injustice
Dans ce contexte, Hussein Maalal, peintre et directeur exécutif de l'association "Fraternité Art" (au service des graffeurs en Tunisie), a expliqué que "l'art du graffiti", appelé aussi "Street Art", "porte toujours un message spécifique orienté vers un public, parfois artistique, et d'autres fois porteur d'une cause commune".
Il poursuit à Anadolu : "La plupart des militants dans ce domaine en Tunisie ont réalisé des travaux sur des questions sociales, telles que l’injustice du régime envers les humains, ou l’injustice imposée aux humains par les institutions".
Toutefois, a-t-il souligné, la question palestinienne "revient toujours dans les slogans écrits sur les murs".
"L'art du graffiti repose sur le fait de laisser les opprimés exprimer leur opinion. Il y a un artiste qui s'exprime et un autre qui exprime les préoccupations de sa nation. Et la Palestine est notre cause", a-t-il soutenu.
Evoquant les obstacles qui s'opposent à la réalisation des peintures murales de graffitis, Maalal a indiqué que les autorités au pouvoir en Tunisie soutiennent la cause palestinienne, ce qui a facilité le travail des graffeurs.
"La plupart du temps, nous devons obtenir un agrément auprès d'un ministère ou une institution publique, ou du propriétaire du lieu sur lequel nous allons exercer notre travail. Mais lorsque la guerre a éclaté à Gaza, les autorités tunisiennes ont soutenu la cause".
Palestine, la cause d'une nation
Dans ce contexte, Maalal a souligné que "la Palestine et la nation arabe ne sont autres qu'une seule nation. Nous avons la même identité et notre proposition artistique exprime la question d'une seule nation, qui est la question de la Palestine".
Maalal a parlé de la relation des graffeurs avec l'art de concevoir des peintures que les supporters des équipes sportives brandissent lors des matchs, affirmant que "l'art des gradins provient d'un groupe de jeunes actifs dans l'art du graffiti".
Il a souligné que la "Dakhla" ou "l'entrée" (une démonstration artistique dans les tribunes avant le début d'un match sportif) de l'équipe de l'Espérance "a été réalisée par un graffeur qui travaille avec nous et au sein de notre école d'art".
Lors du match retour des quarts de finale de la Ligue africaine de football et lors d'un match contre le club congolais du TP Mazembe le 25 octobre, les supporters de l'équipe sportive tunisienne de l'Espérance ont organisé un défilé avant le début du match (Dakhla) au cours duquel ils ont célébré Mohamed Zouari, assassiné dans la ville de Sfax, dans le sud de la Tunisie, en 2016, pour son rôle dans la fabrication des drones des "Brigades Al-Qassam", la branche armée du mouvement Hamas.
A cette époque, les supporters décoraient les tribunes du stade olympique de Radès avec une banderole géante, avec des photos en grand format des visiteurs, et au-dessus était écrit : "Ô Cavaliers de Dieu, triomphez... et réjouissez-vous du Paradis".
Au moment où la banderole flottait sur les gradins, des centaines de drapeaux palestiniens ont été brandis et les supporters de l’Espérance scandaient des slogans glorifiant le travail de Zouari, s’engageant à suivre ses traces.
Pour rappel, Israël avait lancé une campagne militaire massive sur la Bande de Gaza à la suite d'une attaque menée par le Hamas le 7 octobre.
Depuis, elle a tué au moins 14 854 Palestiniens, dont 6 150 enfants et plus de 4 000 femmes, selon les autorités sanitaires de l'enclave.
Le bilan officiel israélien s'élève, lui, à 1 200 morts.