Le Premier ministre sénégalais a installé vendredi un comité pour la commémoration du massacre en 1944 de tirailleurs africains à Thiaroye, près de Dakar, pour "aller plus loin dans la manifestation de la vérité", après que six de ces soldats coloniaux ont été reconnus "morts pour la France" par Paris.
Le comité est présidé par l'historien sénégalais Mamadou Diouf, enseignant à l'Université Colombia de New York.
"La première tâche du comité sera d'élaborer et de valider un chronogramme d'activités détaillées allant du 16 août au 1er décembre 2024 (date du 80e anniversaire, nldr). Il s'agira d'aller plus loin dans la manifestation de la vérité pour que justice soit rendue et que les leçons de cette tragédie soient pleinement intégrées dans notre conscience collective", a déclaré Ousmane Sonko.
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Le Premier ministre a annoncé deux commissions. La première sera chargée d'établir "les preuves, les témoignages, les documents pour comprendre pleinement les évènements". La deuxième, dédiée notamment "aux réparations", devra "proposer des actions pour honorer la mémoire des victimes et sensibiliser les générations futures" sur la tuerie.
Mamadou Diouf a indiqué que la mission du comité sera de "rassembler l'ensemble des informations susceptibles de nous apporter l'éclairage le plus précieux possible sur un évènement (que), pendant des années, la France a essayé d'effacer ou d'enterrer".
"L'idée est de rassembler les archives, les témoignages oraux, artistiques et culturels afin d'apporter une vision que les Africains et les Sénégalais portent pour définir leur identité", a-t-il ajouté.
La mise en place de ce comité fait suite à la reconnaissance par Paris le 18 juin de six tirailleurs "morts pour la France" à titre posthume, une décision mémorielle inédite dans ce dossier douloureux entre la France et ses anciennes colonies.
Au matin du 1er décembre 1944, au camp militaire de Thiaroye, près de Dakar, des troupes coloniales et des gendarmes français avaient tiré sur ordre d'officiers de l'armée française sur des tirailleurs africains rapatriés, qui réclamaient leurs arriérés de solde.
Les tirailleurs africains étaient des soldats du continent qui se battaient sous le drapeau français. Parmi les six hommes concernés, quatre étaient sénégalais, un était ivoirien et un autre burkinabè.
Fin juillet, le Premier ministre, en tant que chef de son parti Pastef-Les Patriotes, avait critiqué la décision de la France, affirmant que ce n'était pas à Paris de "fixer unilatéralement le nombre d'Africains trahis et assassinés".
Selon le bilan des autorités françaises à l'époque, au moins 35 tirailleurs avaient trouvé la mort à Thiaroye. Un chiffre qui reste encore sujet à controverse, certains historiens l'estimant beaucoup plus élevé.