Au Gabon, le taux chômage a grimpé ces dernières années. Plus de 35% du taux de chômage dans un pays/TRT AFRIKA

Par Jean-Rovys Dabany

TRT Afrika - Libreville, Gabon

64 000. C’est le nombre de chômeurs que compte désormais le Gabon, d’après les statistiques du Pôle National de Promotion et de l’Emploi.

Des chômeurs qui représentent 40% de la population active et qui se distingue en deux catégories : d’un côté les non diplômés avec 56 mille chômeurs qui sont les plus nombreux, de l’autre côté, 14 mille diplômés qui sont toujours à la recherche d’emploi.

"Comment se fait-il que nous avons les mêmes diplômes mais certains sont recrutés dans la fonction publique d’autres non? Le pays nous appartient tous", s’emporte Bertina Avomo, installée sur un banc ensoleillé de Libreville, la capitale du Gabon.

À 27 ans, la jeune femme est titulaire d’un Master en finances obtenu dans l’une des prestigieuses écoles de commerces du Gabon.

Mais malgré presque ses deux ans d’expérience dans un établissement de micro-finances, elle n’a pu trouver qu’un poste de professeure vacataire à 5500 FCFA de l’heure dans un établissement scolaire privé.

Comme d’autres jeunes diplômés, Bertina a rejoint cette semaine des milliers de demandeurs d’emplois qui prennent d’assaut les directions des ressources humaines de chaque département ministériel depuis l’annonce du recrutement dans la fonction publique, relancé 5 ans après le gel de celui-ci.

Plus de 50 000 candidatures ont été reçues, selon le ministère de la Fonction publique. D’après le Pôle National de Promotion et de l’Emploi, un jeune Gabonais sur trois est au chômage.

Un ratio qui explique la ruée des candidats vers les postes budgétaires depuis le coup d’envoi de l’opération en cours.

Les jeunes diplômés comme Joël Ndziémi sont obligés de jouer des coudes pour parvenir à candidater à un poste.

"J’ai la foi. Il faut que je depose aussi mon dossier aujourd’hui. Je n’ai pas les moyens pour faire des aller-retour", dit-il, dossier en main dans l’unique ruelle pavée qui mène au ministère de la Fonction publique.

Joël a dû faire homologuer tous ses diplômes obtenus à l’Université de technologie de Durban, en Afrique du Sud. "Je suis passé par l’ambassade d’Afrique du Sud, le ministère des Affaires étrangères pour légaliser mes diplômes", raconte-t-il à TRT Afrika.

L’enjeu social ?

La reprise des recrutements à la fonction publique gabonaise intervient 5 ans après le gel de ce processus par le gouvernement déchu. Une véritable bombe à retardement que le général Brice Oligui Nguema tente de désamorcer.

C’était d’ailleurs l’une des promesses que le successeur d’Ali Bongo avait faite au lendemain du coup d’Etat du 30 septembre : "mettre fin aux souffrances des compatriotes", avait-il dit.

Mais l’opération revêt plutôt un caractère social, d’après Raphaël Ngazouzé, le ministre de la Fonction publique. Pour répondre à la demande, le gouvernement mise sur l’employabilité.

Il s’agit d’un package des mesures urgentes qui prévoit la création des milliers d’emplois dont près de la moitié dans la fonction publique et l’élargissement du nombre des bénéficiaires des programmes d’emplois.

L’objectif de ces programmes : embaucher quelque 100 mille personnes, précise le ministère de la fonction publique.

"J’ai tenu à les réunir afin de les sensibiliser sur la nécessité de voir comment gérer cette nouvelle ressource qui va arriver vers notre département ministériel. Ce, afin de permettre à chacun des compatriotes compétents d’être au service de la Nation", a déclaré récemment Raphaël Ngazouzé lors d’une émission télévisée sur cette campagne de recrutements.

Pour repartir cette main-d’oeuvre, le gouvernement vise plusieurs ministères en particulier : l’Education Nationale, la Santé, les finances, les infrastructures…qui devraient créer des milliers de postes. D’autres postes devraient être absorbés par le ministère du tourisme, l’Agriculture etc, détaille M. Ngazouzé.

L’opération de recrutement en cours affichait déjà au 10 décembre, quelques 50 000 dossiers reçus au ministère de la fonction publique, alors qu’une opération de toilettage du fichier de la fonction publique est en cours.

Un audit commandé par les autorités militaires a révélé en octobre dernier des recrutements fantaisistes. Néanmoins, cette décision porte le rêve de 40% des chômeurs. Avec ses 100 000 salariés, la fonction publique reste le plus gros employeur du pays juste devant le secteur forêt.

"Nous travaillons ensemble avec le ministère de la Fonction publique qui devrait aussi communiquer sur l’évolution des dossiers déjà déposés et traités afin de situer les uns et les autres. C’est important. Car cela permettra de faire une spéculation par rapport aux diplômés et non-diplômés, les sortants des écoles et des universités pour avoir une meilleure lisibilité", explique à TRT Afrika Hans Ivala, directeur général de Pôle National de Promotion et de l’Emploi.

En tournée dans les villes du pays, le général Oligui Nguema a appelé ses compatriotes à se lancer aussi dans l’agriculture, toujours méprisée. D’après le ministère de l’Economie, celle-ci pourrait devenir un précieux vivier d’emplois et améliorer la balance commerciale du pays, qui importe entre 50 % et 80 % de son alimentation.

TRT Afrika