Par Awa Cheikh Faye et Franck Noudofinin
C'est la fin d'une époque au Togo où la dernière des Nana Benz vient d'être enterrée. Dédé Rose Creppy a été inhumée aujourd’hui dans sa ville de Aneho dans le Sud-Est du Togo. La dernière des Nana Benz est morte le 05 juin 2023.
Ses obsèques sont un évènement au Togo, mais aussi dans les pays voisins comme le Benin, le Ghana ou encore la Côte d’Ivoire, car l’histoire des Nana Benz va bien au-delà des côtes togolaises et est très intimement liée à l’histoire du Wax hollandais, ce tissu très prisé dans le mode vestimentaire de l’Afrique de l’ouest et du centre.
Disparu à l'âge de 88 ans, Dédé Rose Creppy a été la présidente de l’Association Professionnelle des Revendeuses de Tissus(APRT) pendant trente ans et ministre du trône royal Lolan à Aneho.
Elle avait reçu plusieurs distinctions et était officier de l’ordre du Mono.
Reines du commerce et de la mode
Dans les années 1970 et 1980, ces célèbres femmes d’affaires contrôlaient une grande partie du commerce togolais, et même de l’Afrique de l’Ouest.
Les "Nana Benz” ont joué un rôle majeur dans l'économie de la région pendant ces années. Elles étaient principalement des commerçantes prospères dans l'industrie du pagne, qui est un tissu traditionnel largement porté en Afrique de l'Ouest et du centre.
Dans la sous-région, tous ont déjà entendu leur surnom, Nana faisant référence à mère ou grand-mère en langue Mina et Benz en référence aux Mercedes Benz qu’elles adoraient conduire dans la capitale togolaise Lomé.
Elles se sont spécialisées dans l'importation, la distribution et la vente de tissus de haute qualité, souvent de marques européennes renommées, tels que le wax hollandais. Les Nana Benz ont bâti leur fortune en établissant des réseaux commerciaux solides et en développant des relations avec les fabricants et les fournisseurs.
Les Nana Benz ont connu leur âge d’or un peu avant les années 1990, avant de voir leur empire vaciller à partir des années 2000 quand les wax chinois et indo-pakistanais ont commencé à inonder le marché africain.
Pour perpétuer leur héritage, ces femmes d’affaires se sont engagées dans la formation de leurs enfants, qu’on appelle affectueusement aujourd’hui les « Nanettes ».
Elles ne roulent plus en Mercedes, mais sont toutes aussi créatives que leurs mères. Elles composent désormais avec les nouvelles technologies pour donner une nouvelle impulsion à leur commerce.