Le président français, Emmanuel Macron, a reçu mardi le rapport élaboré par une commission de chercheurs français et camerounais sur le rôle de la France dans les exactions pendant la colonisation et après l'indépendance du Cameroun, un pan d'histoire sanglant et longtemps tu et méconnu.
Le document porte sur "le rôle et l’engagement de la France au Cameroun dans la lutte contre les mouvements indépendantistes et d'opposition entre 1945 et 1971", a rappelé l'Elysée dans un communiqué.
Sa restitution a été effectuée en présence d'une délégation camerounaise menée par le directeur de cabinet du président Paul Biya et le ministre délégué français chargé de la Francophonie, Thani Mohamed Soilihi.
Emmanuel Macron a salué le "travail scientifique mené par les chercheurs, tout comme le caractère inédit de cette première commission mixte". "Il a également rappelé son attachement à la poursuite du travail de mémoire et de vérité initié avec le Cameroun".
Le rapport doit encore être remis aux autorités camerounaises avant que son contenu ne soit rendu public. La commission a été mise en place lors d'une visite du président français au Cameroun en juillet 2022.
"Conformément à l’engagement pris à Yaoundé en juillet 2022, les archives françaises ont été rendues entièrement accessibles aux chercheurs de la Commission, afin de faire la lumière sur les événements de la période de l’indépendance camerounaise", a souligné l'Elysée.
Des exactions en série
Après la commission Duclert sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda (2021), la Commission mixte franco-camerounaise s'inscrit à son tour dans la politique mémorielle du président français, au coeur de la "nouvelle" relation qu'il prône avec l'Afrique.
Avant l'indépendance du Cameroun en 1960, les autorités françaises ont réprimé dans le sang les nationalistes de l'UPC (Union des populations du Cameroun), un parti nationaliste engagé dans la lutte pour l’indépendance du Cameroun.
Des centaines de milliers de militants pro-UPC, dont le leader indépendantiste Ruben Um Nyobè, ont été massacrés d'abord par l'armée française, puis après l'indépendance par l'armée camerounaise du régime d'Ahmadou Ahidjo qui a mené une répression sanglante.
Pour Gaston Kelman, écrivain français d’origine camerounaise, “la reconnaissance d’un fait historique n’a point besoin de commission. Mon plus convaincant inspirateur n’est autre que Monsieur Macron. On sait avec quelle passion il a condamné l’agression impérialiste de la Russie contre l’Ukraine”, écrit-il dans une tribune à Jeune Afrique.
“Sa conviction et son engagement sont tels qu’il n’hésite pas à traiter d’hypocrite qui ne pense pas comme lui. Lui reprochera-t-on de n’avoir pas attendu, pour se prononcer, le résultat des travaux d’une commission ?”, s'interroge-t-il pour conclure.