Les créations de Belinda Yesum ont été saluées dans son pays d'origine, le Cameroun.

Par Firmain Eric Mbadinga

À 40 ans, la dame partage l'histoire d'une reconversion faite après des années de chômage après avoir obtenu une licence en Banque et finance.

Belinda Yesum passe le plus clair de son temps à imaginer des modèles de couture qu'elle souhaite extraordinaires, par leurs formes et couleurs. Avec son crochet et ses lots de laine de couleurs diverses.

Assise dans sa boutique de Yaoundé, la capitale camerounaise, elle décidée à tricoter une autre création qui lui attire commentaires et partages, comme c'est déjà le cas sur certains médias sociaux.

En effet, depuis peu, les robes, chaussures, nattes de tables et autres accessoires mode exposés sur son compte Facebook ne passent pas inaperçus. Au cours de l'entretien qu'elle accorde à TRTAfrika Belinda Yesum a été surprise en train de travailler sur des boucles d'oreilles.

''J'ai acheté des boucles d'oreilles que j'ai crochetées pour leur donner un aspect plus unique. Ces boucles d'oreilles peuvent être customisées dans n'importe quelle couleur au choix de la cliente.'' explique Belinda.

Belinda Yesum dont les œuvres forcent l'admiration et des centaines de commentaires et de partage sur les médias sociaux, n'était pas censée faire ce métier, s'il fallait considérer sa qualification académique et son parcours scolaire.

Belinda Yesum explique que son parcours, depuis ses premiers dessins, a été semé d'embûches.

Après des études primaires et secondaires classiques, Belinda obtient en 2010 sa licence en Banque finance à l'université de Buéa, dans le Sud-Ouest du Cameroun. Fraîchement diplômée, elle tentera en vain de décrocher un premier emploi, une quête qui durera quatre ans.

''j'ai assisté à un entretien et on m'a dit que j'étais le meilleur candidat à l'entretien, mais à la fin de la journée, je n'ai pas obtenu le poste, peut-être parce que je n'avais pas donné suite à 'certaines propositions en plus ’. C'est donc la chose la plus douloureuse, sachant que vous êtes qualifiés pour le poste, que vous êtes le bon candidat pour le poste et que votre interlocuteur vous confirme que vous êtes la bonne personne pour le poste, mais au final vous ne l'obtenez pas'', explique-t-elle avec un sourire en coin.

Devenue mère, Belinda Yesum tient enfin son premier emploi qui ne durera que le temps d'une rose. Elle prendra son destin en main et décide alors d'être son propre patron.

''Après avoir obtenu mon diplôme en 2010, j'ai trouvé un emploi en 2014 pour un an et j'ai dû démissionner pour des raisons personnelles. J'ai chômé jusqu'en 2018 avant de trouver un autre emploi et dans la foulée, j'ai appris à faire du crochet en ligne avec le projet de créer ma structure 'star crochet', afin d'être autonome. Je suis allée sur YouTube et je passais toutes mes nuits à regarder des vidéos YouTube sur la façon de faire le crochet'', détaille Belinda Yesum.

Les vêtements pour enfants font partie des articles les plus recherchés par ses clients.

Après la phase de l'apprentissage, il a fallu trouver les moyens financiers pour se procurer les matériels techniques et concevoir les premiers modèles qui s'affineront au fil du temps, dans un environnement où peu de gens croyaient en son projet.

''Mes débuts étaient très difficiles. Trouver de quoi acheter du matériel de qualité pour des résultats similaires, ça s'est fait au prix de beaucoup de privations personnelles et sans soutien véritable '', se souvient Belinda, concentrée sur les finitions des boucles d'oreilles qu'elle customise.

La modéliste confie à TRTAfrika avoir trouvé dans le tricotage un côté thérapeutique, déstressant, notamment lorsqu'elle devait répondre à ses charges existentielles.

''En pratiquant cette activité, cela m'a permis de mieux gérer certains moments de dépression. Faire la conception de modèles, et ensuite tricoter ses modèles et les matérialiser, requiert de la concentration, de la dextérité et de l'imagination. On ne peut donc pas penser à autre chose lorsque le fait.'' explique-t-elle dans une hilarité qui aurait pu laisser passer inaperçu une préoccupation du marché, qui ne donne pas toujours le sourire à celle qui est de fait une femme d'affaires.

En effet, si les tenues pour enfants, les chaussons, les robes, bonnets et chaussettes et accessoires décoratifs réalisés par Belinda Yesum sont salués sur ses pages officielles, cette dernière se plaint de la faiblesse des commandes réelles ou encore du côté dérisoire de certaines d'entre elles.

''Pour un 'deux pièces' (culotte et bustiers pour femme) pour lequel je dois acheter plusieurs boules de laine de couleurs et de qualité différentes, j'ai reçu une proposition de 5 000 CFA. Tricoter de telles pièces requiert au moins quatre jours de travail'', fait savoir Belinda.

La demande est également forte pour les tenues féminines.

Au-delà de la mobilisation et du plébiscite populaire sur les médias sociaux, Belinda espère des commandes réelles qui lui permettent véritablement de vivre de son art.

''Ce que je fais relève de l'art. Pour certaines créations, il me faut parfois des semaines de travail et quand le résultat n'est pas beau, il m'arrive même de recommencer le travail, mais parfois les clients ne le comprennent pas à travers leurs offres en termes de prix'' fait savoir Belinda.

Malgré un emploi de temps parfois chargé, elle s'organise à former des jeunes et des femmes dans les techniques du tricotage 100 % fait à la main qui est pour elle un vieil héritage de la société et qui ne doit pas disparaître.

TRT Afrika