Elle avait demandé à la Haute Cour de Kigali d'annuler ses condamnations, ce qui lui aurait permis de se présenter aux élections du 15 juillet, malgré l'interdiction légale faite aux candidats condamnés qui ont été emprisonnés pendant six mois ou plus.
"La Cour estime que la demande d'annulation de la condamnation de Mme Ingabire n'est pas acceptée", a déclaré un juge en lisant la décision.
"La Cour estime que la grâce présidentielle accordée à Mme Ingabire était assortie de conditions qu'elle devait respecter", a déclaré le juge, ajoutant que "son appel n'était donc pas fondé".
"Je ne suis pas d'accord avec cette décision. Elle est clairement politisée. Nous avons toujours un pays où les tribunaux ne sont pas indépendants", a déclaré Mme Ingabire à l'AFP après la décision du tribunal.
Selon la loi rwandaise, elle ne pourra faire appel de la décision qu'au bout de deux ans.
Le scrutin devrait permettre à M. Kagame de rempiler pour un quatrième mandat de sept ans, après avoir présidé à l'adoption d'amendements constitutionnels controversés lui permettant de rester au pouvoir jusqu'en 2034.
Âgé de 66 ans, il est à la tête de ce pays africain enclavé depuis des décennies et a remporté les élections présidentielles de 2003, 2010 et 2017, avec plus de 90 % des voix.
Le seul adversaire connu de M. Kagame dans le scrutin de juillet est le chef du Parti vert, Frank Habineza, qui a obtenu 0,45 % des voix en 2017. Tous les autres partis d'opposition légalement enregistrés soutiennent le Front patriotique rwandais au pouvoir.
Le mouvement Dalfa Umurinzi (Développement et liberté pour tous) d'Ingabire n'est pas officiellement enregistré au Rwanda.
Hutu de souche, M. Ingabire, 55 ans, a été accusé de "divisionnisme" après avoir publiquement remis en question la version gouvernementale du génocide de 1994 visant la minorité tutsie, qui a fait environ 800 000 morts.
Kagame a été félicité pour avoir apporté la stabilité à la nation africaine, mais le triste bilan de son gouvernement en matière de droits de l'homme lui a valu d'être blâmé.
Un besoin urgent de réformes
Dans une déclaration publiée sur les médias sociaux après le verdict de mercredi, M. Ingabire a déclaré que la décision "n'est pas simplement un revers personnel, mais qu'elle est emblématique des problèmes plus vastes auxquels notre nation est confrontée".
"La décision d'aujourd'hui est un rappel brutal des obstacles à la participation politique et de la nécessité urgente de réformer la gouvernance de notre pays.
Mme Ingabire accuse régulièrement le dirigeant rwandais de réprimer la dissidence et de négliger les pauvres.
Après sa sortie de prison en 2018, elle avait déclaré aux journalistes qu'elle avait été libérée en raison de la pression internationale exercée sur le gouvernement rwandais, ce qui avait suscité une mise en garde de la part de M. Kagame : "Ne soyez pas choquée si vous retournez en prison".
Installée aux Pays-Bas depuis 1994, Ingabire est retournée au Rwanda en 2010, avec l'intention de se présenter à l'élection présidentielle en tant que dirigeante des FDU-Inkingi.
Mais elle a été arrêtée après avoir demandé que les auteurs de crimes contre la majorité hutue soient également poursuivis et punis.
De nombreux hommes politiques de l'opposition ont disparu ou ont été tués dans des circonstances mystérieuses au cours des dernières années. Un membre de l'ancien parti d'Ingabire, le FDU-Inkingi, a été poignardé près de la capitale Kigali en septembre 2019, six mois après l'enlèvement du porte-parole du parti, Anselm Mutuyimana, dont le corps a ensuite été retrouvé dans une forêt.