À la suite du coup d'État intervenu mercredi 30 août au Gabon, le président Ali Bongo Ondimba a été déchu et "mis à la retraite" par le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI). Le général Brice Oligui Nguema, chef de la Garde républicaine, a, quelques heures plus tard, été nommé, président de la Transition et devrait prêter serment le 4 septembre.
Ali Bongo, qui avait nouvellement été réélu pour un troisième mandat avec plus de 64 % des voix, a été placé en résidence surveillée et plusieurs personnalités politiques proches de celui-ci ont été arrêtées.
Après sa prestation de serment, le nouvel homme fort de ce pays d'Afrique Central, aura entre autres à charge d'organiser la gestion des nombreuses ressources de ce pays.
En effet, le Gabon est connu pour ses réserves de pétrole, de bois, de manganèse (un métal utilisé dans la production d'acier et de batteries) et des réserves quasiment épuisées d'uranium, exploitées entre 1961 et 1999 par la société française Orano, ex-Areva.
À ce jour, l'ambassade de France au Gabon indique qu'approximativement 110 entreprises françaises sont présentes dans ce petit pays, soit plus qu'au Nigéria ou au Cameroun.
Parmi ces entreprises, 81 détiennent des filiales dans ces secteurs clés de l'économie. Le groupe minier Eramet a plus de 90 % de part du manganèse gabonais. Le groupe Perenco, les pétrogaziers TotalEnergies et Maurel & Prom et le fonds d'investissement Meridiam sont eux très présents dans le secteur du pétrole.
Environ 14.000 emplois et 3.5 milliards de chiffres d'affaires, soit près d'un cinquième du produit intérieur brut nominal du Gabon, sont générés par les entreprises françaises, avec un stock d'investissement proche d'un milliard de dollars.
Eramet et le manganèse
Le groupe minier français Eramet, deuxième producteur de manganèse au monde, est détenu à 37 % par la famille Duval et à 28 % par l'État français. Eramet a annoncé, ce mercredi, la reprise progressive de ses activités au Gabon, après une courte interruption, dans le contexte du coup d'État.
À travers ses filiales Comilog et Setrag, Eramet emploie plus de 8700 personnes (salariés et sous-traitants) au Gabon, selon l'information disponible sur Site Web. Elle a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 5 milliards d'euros en 2022.
La valeur de l'action Eramet a plongé de plus de 16 % au cours de la journée de mercredi, à la suite du coup d'État au Gabon, avant de reprendre de la valeur jeudi, suite à l'annonce de la reprise de ses activités dans le pays.
Eramet possède également la Société d'exploitation Setrag, qui contrôle la seule compagnie de chemin de fer du Gabon, et en détient le principal port minéralier. En 2022, Eramet employait 8.700 personnes dans le pays.
Le géant des mines et de la métallurgie est le premier producteur mondial de manganèse qui constitue la majorité de ses activités essentiellement basées au Gabon, pays dont elle exploite 90 % de ce métal précieux (4,8 millions de tonnes en 2019) qui sert à la production d'acier et de batteries.
En 2022, la compagnie minière de l'Ogooué (Comilog), filiale d'Eramet, est la société qui a réalisé le plus gros chiffre d'affaires au Gabon devant TotalEnergies.
TotalEnergies, le roi du pétrole au Gabon
La société française TotalEnergies est installée au Gabon depuis 1928.
À ce jour, le groupe emploie 350 salariés sur place et produit entre 15 000 et 20 000 barils d'équivalent pétrole par jour à travers notamment sa filiale TotalEnergies EP Gabon, active dans l'exploration et la production d'hydrocarbures. À titre de rappel, le Gabon est le quatrième producteur de pétrole d'Afrique sub-saharienne et est membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) depuis 2016, après l'avoir initialement quittée en 1996.
En 2022, TotalEnergies EP Gabon a réalisé un chiffre d'affaires estimé à 521 millions de dollars, 655 millions de dollars l'année précédente.
L'entreprise française est également leader dans la vente du carburant dans le pays d'Afrique centrale et y dispose de 45 stations-services.
TotalEnergies au Gabon, c'est aussi 49 % de la Compagnie des Bois du Gabon (CBG) depuis 2022.
L'action de TotalEnergies EP Gabon a connu un recul de plus de 14 % suite au coup d'État dans le pays, mercredi, avant de récupérer la moitié de ses pertes le lendemain.
Autres acteurs des hydrocarbures
Outre TotalEnergies, la société française Maurel & Prom et la Franco-britannique Perenco exploitent des gisements de gaz au Gabon, généralement moins rentables que ceux exploités par la géante pétrogazière française.
Maurel & Prom a ainsi annoncé, le mois dernier, le rachat à la société d'investissement Carlyle de la compagnie pétrolière Assala Energy, active au Gabon, pour 730 millions de dollars. Maurel & Prom n'a pas interrompu son activité à la suite du coup d'État au Gabon, malgré une petite perte de valeur.
Perenco, dont le siège est en France, a racheté à TotalEnergies une importante part des activités d'extraction de pétrole au Gabon, devenant le premier acteur du pays, avec plus de la moitié de la production.
Perenco contrôle aussi le terminal pétrolier du Gabon, proche de Port-Gentil, la capitale économique du pays. Dans le cadre de ses activités, la société franco-britannique est accusée par diverses ONG de défense de l'environnement de "pollutions répétées", notamment suite à des fuites dans des cuves.
Perenco constitue "l’épine dorsale du secteur gabonais des hydrocarbures, ainsi que, de très loin, le premier contribuable du pays".
Meridiam et le financement
Meridiam, le fonds d’investissement français spécialisé dans le financement d'infrastructures publiques, déclare sur son site Internet avoir déjà investi plus de 5 milliards d'euros avec ses partenaires en Afrique, dont 1,5 milliard d'euros au Gabon.
Il a annoncé en juin dernier sa volonté de doubler ses investissements sur le continent au cours des trois prochaines années.
Meridiam déclare être actif sur 4 projets d'infrastructures au Gabon : la construction du barrage hydroélectrique de Kinguele Aval (avec le Fonds Gabonais d’Investissements Stratégiques), du port minéralier d’Owendo (le second port minéralier du pays), la réhabilitation d’un tronçon de 93 km de la route Transgabonaise (avec la société ARISE basée à Singapour et essentiellement détenue par des actionnaires suédois et néerlandais).
Meridiam est aussi actif sur la rénovation de la principale ligne de chemin de fer du pays (SETRAG), le Transgabonais (aux côtés de la Française Eramet)
Parmi les autres entreprises françaises actives au Gabon, figurent également Air Liquide, Spie Oil & Gas, Air France, l'armateur CMA CGM, Bolloré Africa Logistics, Colas spécialisé dans les travaux publics, Rougier (vente du bois), l'assureur Axa, ainsi que Havas, Canal+, Atos et Servair.