Le parlement sénégalais approuve le report des élections. Photo : Others

L'Assemblée nationale sénégalaise a adopté lundi en fin de journée un projet de loi reportant l'élection présidentielle au 15 décembre, au cours d'une séance tendue où les législateurs de l'opposition ont été expulsés de force de l'hémicycle.

Les législateurs de la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY) du président Macky Sall et d'une coalition d'opposition connue sous le nom de Wallu Senegal ont soutenu le report de l'élection à l'issue d'une séance houleuse caractérisée par des scènes chaotiques.

Le projet de loi a été adopté par 105 voix pour et une voix contre.

Le vote a eu lieu deux jours après que M. Sall a annoncé la suspension des élections présidentielles pour une durée indéterminée, en raison d'un différend sur la liste des candidats et de la corruption présumée des juges constitutionnels.

Sall pourrait rester au pouvoir

Des scènes chaotiques ont éclaté après qu'un groupe de législateurs de l'opposition a tenté de bloquer un vote parlementaire en se précipitant sur l'estrade centrale et en refusant de partir, interrompant de fait la session plénière pendant plus d'une heure.

Alors que les esprits s'échauffaient, des images ont montré certains législateurs se bagarrant après s'être échangés des insultes.

Le président du Parlement s'est retiré de l'hémicycle. Finalement, les législateurs de l'opposition ont été expulsés de force de l'hémicycle par le personnel de sécurité avant que la session ne reprenne.

À l'extérieur de l'Assemblée nationale, des dizaines de gendarmes ont patrouillé dans la zone pour empêcher les foules qui voulaient protester contre le report de l'élection.

Le mandat du président Sall s'achève officiellement le 2 avril. Mais après le vote de lundi, M. Sall, qui a annoncé en juillet qu'il ne briguerait pas un troisième mandat, restera en fonction jusqu'aux élections.

Télévision et Internet coupés

Le Sénégal est plongé dans le chaos politique depuis que M. Sall a annoncé le report de l'élection présidentielle pour une durée indéterminée.

Des manifestations ont éclaté dans tout le pays dimanche, menées par les partis politiques d'opposition et certains groupes de la société civile qui ont accusé M. Sall d'utiliser des "raisons fallacieuses" pour reporter l'élection quelques heures seulement avant le début de la campagne.

Certains leaders de l'opposition se sont opposés au report de l'élection, notamment l'ancien Premier ministre Aminata Touré, qui a été arrêtée lors d'une manifestation à Dakar, la capitale, dimanche.

Les autorités sénégalaises ont suspendu le signal de Walf TV, une chaîne de télévision privée, l'accusant d'inciter à la violence.

Par ailleurs, le gouvernement a suspendu l'accès à l'internet mobile pour tenter de réprimer les manifestations.

Manifestations

Lundi, des manifestants devant l'Assemblée nationale à Dakar ont été dispersés par la police anti-émeute alors que les législateurs se réunissaient pour le vote crucial.

Le mois dernier, le Conseil constitutionnel sénégalais a approuvé la candidature de 20 personnes à l'élection présidentielle, dont la campagne devait commencer le 4 février.

Deux partis d'opposition ont décidé de contester le report de l'élection devant les tribunaux.

Le porte-parole de l'ONU a déclaré lundi que l'organisation suivait "de très près" la situation au Sénégal.

"Pour le Secrétaire général (Antonio Guterres), il est très important que toutes les parties prenantes maintiennent un environnement pacifique et s'abstiennent de toute violence et de toute action susceptible de saper le processus démocratique et la stabilité au Sénégal", a déclaré Stéphane Dujarric à la presse.

Il a ajouté que les parties prenantes devraient "résoudre rapidement les différends par le biais d'un consensus et surtout dans le respect de la longue tradition de gouvernance démocratique du Sénégal".

AA