Niger / Photo: AFP Archive

Par Kabiru Adamu

La sous-région ouest-africaine est au centre d'une lutte d'influence et de domination entre les puissances mondiales.

L'élément le plus évident dans ce contexte est l'intervention militaire dans la gouvernance de certains pays de la sous-région. Ceci en dépit de la détermination de la région à maintenir la gouvernance démocratique.

Actuellement, quatre des 15 membres de la sous-région : le Burkina Faso, la Guinée, le Mali et le Niger, sont gouvernés par des juntes militaires.

Le coup d'État le plus récent a eu lieu en République du Niger le 26 juillet 2023, quelques semaines seulement après que le nouveau président de la CEDEAO, le président nigérian Bola Ahmed Tinubu, s'est engagé à relancer la gouvernance démocratique dans la sous-région.

Un fort sentiment anti-français a précédé le coup d'État au Burkina Faso, en Guinée, au Mali et en République du Niger. Ironiquement, les quatre pays sont d'anciennes colonies françaises.

Aucune renonciation

Les récits autour des sentiments anti-français ont tourné autour de l'exploitation des ressources naturelles au détriment des citoyens de ces pays, de la privation économique et de l'insécurité.

La cristallisation de ces sentiments anti-français par la junte militaire dans les quatre pays leur a permis un soutien public massif. Incidemment, alors que ces pays étaient confrontés à l'isolement, la Russie et Wagner, "son entrepreneur militaire privé" y ont fait d'énormes progrès.

Dans son discours d'acceptation en tant que président de la CEDEAO, le chef de l'Etat nigérian, Bola Ahmed Tinubu, a déclaré que cette organisation ne renoncerait pas à sa position de défendre et de préserver l'ordre constitutionnel.

"Certains observateurs affirment qu'une nouvelle ruée vers l'Afrique est en cours et qu'elle ressemble beaucoup à l'ancienne ruée qui a pillé notre continent", a déclaré le président Tinubu.

''Mais, ici et maintenant, que l'on dise à qui que ce soit que notre continent est peut-être vieux mais que notre esprit est nouveau. Et c'est fort. Le mal qui a eu lieu dans le passé doit rester là. Cela ne se répétera jamais », a-t-il prévenu.

Obligation

Il n'était donc pas surprenant que les chefs d'État membres de la CEDEAO se soient rencontrés au lendemain du coup d'État et aient annoncé un ensemble de mesures strictes contre la République du Niger, qui incluait la menace d'une intervention militaire si au bout de sept jours (c'est-à-dire d'ici le dimanche août 06, 2023) la junte militaire ne libère pas le président démocratiquement élu et ne restaure pas la loi constitutionnelle dans le pays.

L'éventuelle intervention militaire en République du Niger est conforme à la politique de non-acceptation par la CEDEAO du changement anti-constitutionnel. Agir dans ce sens est une bonne chose en soi, conformément à l'esprit du pacta sunt servanda.

La CEDEAO a une règle permanente selon laquelle, en aucune circonstance, un changement anti-constitutionnel de gouvernement ne serait acceptable dans ses relations inter-étatiques.

Par conséquent, en vertu de la règle pacta sunt servanda, tous les États membres de la CEDEAO ont la responsabilité de se conformer fidèlement aux obligations contractées du fait de leur adhésion à l'organisation régionale.

Au terme d'une réunion de trois jours des chefs militaires des États membres de la CEDEAO, qui s'est tenue à Abuja du 03 au 05 août 2023, son commissaire à la paix et à la sécurité, Abdel-Fatau Musah a déclaré que "tous les éléments liés à une éventuelle intervention ont été élaborés ».

Il a ajouté que ceux-ci incluaient "les ressources nécessaires, y compris comment et quand nous allons déployer la force".

Le groupe régional n'a pas exclu la diplomatie. "Nous voulons que la diplomatie fonctionne, et nous voulons que ce message leur soit clairement transmis (la junte) que nous leur donnons toutes les chances d'inverser ce qu'ils ont fait", a déclaré Musah.

Ceci en dépit d'un fort ressentiment à l'idée d'une intervention militaire par une grande partie de la population nigériane.

Voisins

Pendant que tout cela se poursuit, la junte militaire de la République du Niger a adopté une position de défi, le président Mohammed Bazoum étant toujours en détention, et s'occupant de la formation d'un gouvernement tout en recherchant des alliances à travers et au-delà de la sous-région.

Déjà, l'Algérie, le Burkina Faso, le Tchad, la Guinée et le Mali ont exprimé leur opposition à une intervention militaire au Niger.

Alors que ces problèmes continuent de se poser, il y a des inquiétudes quant à une plus grande implication régionale et des conséquences de l'effort de lutte contre l'insécurité dans la sous-région ainsi que le désir d'enraciner la gouvernance démocratique.

Certaines de ces préoccupations incluent la possibilité que la République du Niger mette fin à sa coopération avec l'organe intergouvernemental et la force conjointe du G-5 Sahel (créés en 2014) ; La République du Niger s'est d'ailleurs retiré de la Force multinationale interarmées (MNJTF) en tant que force collective de lutte contre les groupes militants.

Il existe également des inquiétudes quant à la possibilité que la République du Niger se retire de l'Initiative d'Accra (2017) qui est un mécanisme visant à promouvoir et à renforcer la coopération en matière de sécurité en se concentrant sur les dynamiques transfrontalières localisées en réponse à l'insécurité croissante liée à l'extrémisme violent (et aux chocs climatiques) en Afrique. la région).

Ces scénarios pourraient davantage compromettre la lutte contre le terrorisme et les insurrections dans la sous-région.

Il est envisagé qu'à mesure que la stratégie d'isolement de la CEDEAO, de l'Union africaine (UA) et de la communauté internationale force le Niger, la Guinée, le Mali et le Burkina Faso à fusionner davantage, il pourrait ne pas y avoir de transition rapide vers la démocratie.

Si les divisions persistent entre les pays d'Afrique de l'Ouest, on craint que les pays ne soient détournés de leur objectif commun de lutte contre l'insécurité.

L'auteur, Kabiru Adamu, est un spécialiste de la gestion des risques de sécurité et du renseignement basé au Nigeria.

Avertissement : Les points de vue exprimés par l'auteur ne reflètent pas nécessairement les opinions, points de vue et politiques éditoriales de TRT Afrika.

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