Les présidents djiboutien Ismail Omar Guelleh et français Emmanuel Macron, à Paris, le 11 novembre 2018. (Photo: Reuters)

Le coup de froid qui souffle, depuis un certain temps, sur la coopération militaire entre la France et ses anciennes colonies africaines semble épargner Djibouti.

Tandis que le Sénégal et le Tchad ont dénoncé cette semaine les traités militaires les liant avec la France, une dynamique positive émerge dans la coopération sécuritaire entre Paris et Djibouti, la capitale du pays éponyme.

Le 24 juillet dernier, au palais de l’Élysée à Paris, le président français, Emmanuel Macron, et son homologue djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh, se sont accordés sur le renouvellement de leur partenariat de défense pour une durée de 10 ans.

Cette alliance va à l’encontre des logiques souverainistes qui ruinent actuellement la coopération militaire entre la France et les pays africains.

Situé au débouché de la Mer Rouge, la République de Djibouti, ce petit État de la corne de l’Afrique, valorise sa position géostratégique. 40% du pétrole mondial transite en effet entre le Golfe d’Aden et la mer Rouge.

Outre la France, le pays loue de l’espace à six autres puissances (États-Unis, Chine, Japon, Espagne, Allemagne et Arabie Saoudite) pour abriter des bases militaires.

Paris paye chaque année une rente de 30 millions d’euros pour le loyer de sa base militaire à Djibouti.

3% du PIB

Ces bases militaires étrangères, explique Jean Luc Martineau (chercheur au Centre d’études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques de l’université de Paris) sont une source de revenu directe essentielle.

Le pays monnaye plus ou moins chèrement la location des emprises militaires.

“La rente qui provient des bases militaires équivaut à 3% du PNB. Elle est supérieure au revenu des exportations du pays (à peine 104 millions d’euros par an)”, souligne Jean-Luc Martineau qui y a consacré une étude dans la revue en ligne de géographie politique et géopolitique.

C’est dire que le business des bases militaires de Djibouti est un enjeu socio-économique grandissant dans un pays sans ressources naturelles connues et aux prises avec le chômage. “La base américaine (le camp Lemonnier) est le troisième employeur du pays”, signale Jean-Luc Martineau.

Djibouti est situé dans une zone déchirée par de nombreux conflits avec souvent des implications étrangères: conflit Éthiopie-Érythrée, instabilité somalienne et Yémen. Les divers accords de défense sont susceptibles de dissuader des pays mal intentionnés et assurer la sécurité du pays.

Le conditionnel est de mise dans la mesure où en 2008, la France s’est abstenue d’intervenir dans le conflit armé entre Djibouti et l’Érythrée au sujet d’une dispute frontalière.

Pour autant, l’armée djiboutienne bénéficie des formations et du matériel fournis par la France et d’autres partenaires sur place.

La qualité de la coopération militaire entre Djibouti et la France tranche pour le moment avec les remous observés avec les États du Sahel. L’impact économique du “commerce des bases militaires” y serait pour quelque chose.

Le traité (Traité de coopération en matière de défense du 24 juillet 2024, ndlr), explique Jean-Luc Martineau, est tacitement reconductible et prévoit une clause de retrait qui autorise Djibouti à demander le départ des forces militaires. Un délai de 12 mois est accordé avant l’exécution de cette demande.

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