"J'ai vu neuf corps qui étaient devant moi", dont plusieurs enfants, a déclaré à l'AFP Dédesi Mitima, chef du quartier Lac Vert, à l'ouest du chef-lieu de la province du Nord-Kivu.
Un responsable de la société civile locale a affirmé avoir lui-même "compté huit corps sur le lieu du drame et des blessés", dont certains "dans un état critique".
"Nous venons de recevoir 32 blessés et quatre corps", a indiqué une source hospitalière sous couvert d'anonymat.
"Nous recoupons un bilan de 10 morts", a quant à lui déclaré le colonel Mokili Matabishi Munguakonkwa, chef de la "police de sécurisation" des camps de déplacés de la région.
Selon des témoignages, encore confus en début d'après-midi, des "bombes" sont tombées dans la matinée sur des huttes de déplacés de part et d'autre de la route menant de Goma à Saké, cité considérée comme un verrou stratégique à une vingtaine de km de la capitale provinciale.
Appuyés par des unités de l'armée rwandaise, les rebelles du M23 (pour "Mouvement du 23 mars") ont repris les armes fin 2021 après plusieurs années de sommeil et se sont emparés de larges pans de territoire du Nord-Kivu, allant jusqu'à encercler presque entièrement Goma.
La ville compte plus d'un million d'habitants et près d'un million de déplacés, arrivés par vagues successives depuis le début de l'offensive rebelle.
L'origine des bombardements de vendredi n'est pas clairement établie, mais le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a accusé sur X "l'armée rwandaise et ses supplétifs terroristes du M23" d'en être responsables. "L'horreur dans sa forme la plus grave ! Une bombe sur des civils, des morts, des enfants ! Nouveau crime de guerre !", a-t-il accusé.
Depuis le début de la matinée, selon des témoins, les forces gouvernementales, qui ont installé une position non loin du camp, bombardaient les rebelles sur des collines plus à l'ouest et, selon un acteur de la société civile, "le M23 a riposté en lançant des bombes à l'aveuglette".
Cité minière
Les combats s'étaient intensifiés début févr ier autour de Saké et la rébellion s'est emparée depuis de nouvelles localités du territoire de Masisi, au nord-ouest de Goma.
Le M23 a pris le contrôle cette semaine de la cité minière de Rubaya, d'où est notamment extrait du coltan, minerai stratégique pour l'industrie électronique.
Les autorités de RDC accusent le Rwanda de vouloir faire main basse sur les richesses de l'Est congolais, ce que Kigali conteste.
Début avril, la mission de l'ONU en RDC (Monusco) décrivait une situation sécuritaire "de plus en plus volatile".
A la demande des autorités de Kinshasa, qui la jugent inefficace, la Monusco a entamé son retrait "accéléré" de l'est de la RDC, après 25 ans de présence, en commençant par la province du Sud-Kivu où elle a officiellement mis fin mardi à ses opérations.
Jusqu'à présent, les initiatives diplomatiques régionales lancées pour tenter de régler la crise n'ont rien donné.
En visite cette semaine en France, le président congolais Félix Tshisekedi a répété qu'il ne serait "possible de discuter" avec le Rwanda qu'une fois que son armée "aurait quitté" la RDC.
Le président français Emmanuel Macron a de son côté exhorté le Rwanda à "cesser tout soutien" au M23 et à "retirer ses forces" du pays.
Il a aussi évoqué un "engagement" de Félix Tshisekedi à "mettre fin aux agissements des FDLR" (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda), un groupe armé créé par d'anciens responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, et dont la présence depuis 30 ans dans l'est de la RDC est dénoncée par Kigali.