Kemi Seba
Régulièrement dans le viseur de Paris, et de la presse française pour leurs positions anticoloniales en Afrique, des militants panafricains tels que Kemi Seba, Nathalie Yamb et Franklin Nyamsi, ne cessent de faire l’objet de pressions et de diabolisation en France.
Dernier en date, le militant panafricain franco-béninois Kemi Seba, a révélé jeudi un courrier du ministère français de l’Intérieur, le menaçant de lui retirer sa nationalité française.
Et pour cause, de par ses nombreuses interventions à succès dans les médias, sur les réseaux sociaux ou en conférence, dans lesquelles il dénonce le “pillage” et les activités “néocoloniales” menées par la France en Afrique, l’activiste panafricain attiserait le “sentiment anti-français” et porterait atteinte aux “intérêts français” dans le continent.
Kemi Seba n’a pas hésité de réagir en termes forts sur ses différents comptes de réseaux sociaux, suivi par près de 2 millions d'abonnés.
"Cher gouvernement français, Votre réaction profondément néocoloniale constitue pour nous une IMMENSE DÉCORATION DE GUERRE, preuve s’il en fallait, de l’efficience de notre travail de déconstruction de la Françafrique", a-t-il tonné.
"Le gouvernement français, dépassé par le succès de notre combat anticolonialiste auprès des masses africaines et diasporiques craque, et dans un réflexe négrophobe désespéré dont il a le secret, veut en réaction me retirer la nationalité française. On ne mendiera RIEN auprès de vous. JAMAIS de la vie. Je ne suis pas de ceux qui pleurent lorsqu’ils sont expulsés ou discriminés.Vous êtes tombés sur le mauvais NOIR", a-t-il encore lancé.
Nathalie Yamb
Mais ce n’est pas la première fois qu’un panafricaniste est dans le collimateur de la France. En octobre 2022, une autre figure à succès, la politicienne et activiste suisso-camerounaise Nathalie Yamb, avait été interdite d’entrée et de séjour dans le territoire français par un arrêté officiel du ministre de l'Intérieur, daté du 12 janvier 2022.
Le texte de l'arrêté, qui était resté confidentiel pendant neuf mois, jusqu'à ce qu'il soit formellement adressé à Nathalie Yamb, lui reprochait notamment les "diatribes récurrentes qu'elle profère contre la France et ses autorités” alimentant ainsi “l’entrisme des puissances étrangères hostiles à la France sur le continent africain”. Le texte l’accuse également “d’alimenter le développement d’un ressentiment populaire anti-français en Afrique, mais également parmi les diasporas africaines en France”.
L'arrêté du ministère français de l'Intérieur critique aussi sa proximité avec l'ancien Président ivoirien Laurent Gbagbo et avec l'ancien Président de l'Assemblée nationale ivoirienne, Mamadou Koulibaly.
Franklin Nyamsi
Franklin Nyamsi, professeur de philosophie franco-camerounais à Rouen, mais aussi militant panafricain populaire qui compte plus de 200 000 abonnés sur X, avait été suspendu en mai 2023, par le ministère français de l'Education nationale, pour avoir, signale-t-il, "critiqué la politique africaine du gouvernement français".
"Le ministre me reproche explicitement mes critiques de la politique africaine de la France. Et j’ai été l’objet de nombreuses convocations disciplinaires depuis mai 2021 pour les mêmes raisons alléguées. L’épée de Damoclès qui planait sur moi depuis 2021 vient donc enfin de s’abattre" avait-il annoncé sur X.
Dans un entretien accordé à l'agence russe Sputnik, Nyamsi a déclaré qu’il exprime ses opinions concernant la politique africaine de la France depuis plus de vingt ans, soulignant qu’il n’avait “jamais été convoqué ni sommé de se taire” sous les présidences de Chirac, Sarkozy et Hollande.
"C’est depuis mai 2021 que cela m’arrive, ce qui veut dire qu’il y a une dérive autoritaire incarnée par le gouvernement du Président Macron. Il est hors de question que je renonce à être ce que je suis, simplement sur injonction d’un pouvoir en pleine dérive brutale contre les libertés d’abord du peuple français et, c’est une tradition, contre la liberté des Africains”, s'était-il indigné.
Professeur de philosophie français d’origine camerounaise, Franklin Nyamsi a obtenu son doctorat à l’université Charles de Gaulle-Lille 3. Il a enseigné dans divers établissements français à Nantes, Lille et Rouen, ainsi qu'au Cameroun et en Côte d'Ivoire.