Alliés d'hier, les généraux Hemedti (à gauche) et Al-Burhan ( à droite) se déchirent aujourd’hui sur fond de violences. Photo : Getty Images

Par Mamadou Dian Barry

Son portrait fait la une des médias du monde entier depuis quelques heures. Le général Moahmed Hamdane Dagalo dit « Hemedti » à la tête du groupe paramilitaire Rapid Support Forces (RCF), une force d’intervention rapide affirme que ses hommes tiennent le palais présidentiel à Khartoum. Ce que l’armée nie. Mais qui est cet officier supérieur entré en rébellion contre le pouvoir militaire du général Abdel Fatah al-Burhan ?

Hemedti accuse al-Burhane, chef de l’armée soudanaise d’avoir « détruit le pays ». Photo : AFP

Âgé de 48 ans, l'homme a évolué jusque-là dans l'ombre du pouvoir depuis dix ans. Mais depuis samedi, hemedti assure que ses hommes ont pris le contrôle du palais présidentiel et de l’aéroport international après de violents affrontements. Ce que l’armée a démenti, dans la foulée, dans un communiqué.

Originaire d’une tribu nomade du Darfour, comme la plupart des membres de sa force qui compte environ 100.000 hommes, il assure que les combats ne s’arrêteront pas « avant d’avoir pris le contrôle de l’ensemble des bases militaires ». Hemedti accuse al-Burhane, chef de l’armée soudanaise d’avoir « détruit le pays ».

Il accuse également le général Al-Burhan de fomenter un coup d’Etat pour, dit-il, légitimer l’action de ses hommes. Il appelle ainsi la population à lui faire barrage.

Le bras de fer entre les numéros un et deux du régime militaire, ayant renversé l’ancien dirigeant Omar el-Béchir, a débuté il y a quelques semaines. Le général Hemedti s’oppose à l’incorporation des RSF dans l’armée régulière et a récemment multiplié les sorties contre le chef de l’armée.

Au sein de la population, son nom est synonyme de terreur. Le général Hemedti est considéré comme celui qui a dirigé la répression contre les manifestations avant la chute de l’ancien président el-Béchir en 2019.

Il est recruté au début des années 2000 et mandaté par le pouvoir d’alors pour mater la rébellion qui sévit au Darfour. Son nom sera par la suite associé aux crimes commis dans cette région. Lui et les milices qu’il dirigeait alors sont accusés de plusieurs exactions, à l’origine des poursuites qui visent l’ex-président Omar el-Béchir.

Quand les Rapid Support Forces ont été créées pour devenir une garde rapprochée d’Omar el-Béchir, le général "Hemedti" en a pris la tête. Il débarque alors à Khartoum et devient le leader de la force paramilitaire la plus puissante du Soudan.

Après la destitution d’Omar el-Béchir, en avril 2019, Mohamed Hamdane Dagalo a encore gagné en influence.

En octobre 2021, quand l’armée soudanaise mène une opération contre le gouvernement de transition pour prendre le pouvoir par la force, Mohamed Hamdane Dagalo soutient l’action pour évincer les civils du pouvoir. Résultat : le responsable des RSF et le chef de l’armée s’unissent pour occuper les postes clés.

Mohamed Hamdane Dagalo devient vice-président du Conseil de souveraineté de transition du Soudan, alors que le chef de l’armée, Abdel Fattah al-Burhan, en prend la présidence.

Ce sont ces deux hommes qui se déchirent aujourd’hui sur fond de violences.

Le Général Abdel Fatah al-Burhan

Le 12 avril 2019, le général Abdel Fattah al-Burhan prend la tête du Conseil militaire de transition, au lendemain de la chute d’Omar el-Béchir. Photo : AP

Il est le chef de l’armée soudanaise et a dirigé le putsch contre Omar el-Béchir. Il conduit, depuis, les destinées du Soudan. Qui est l’homme fort de Khartoum ?

Abdel Fattah al-Burhan naît en 1960 à Gandatu, un petit village situé au nord de Khartoum, la capitale soudanaise. Il commence ses études primaires et secondaires dans son village natal, avant de les terminer dans la ville voisine de Shendi. Il rejoint ensuite la 31e promotion du Collège militaire soudanais.

Après l’obtention de son bac, il a intégré l’armée. Abdel Fattah al-Burhan s’est ensuite rendu en Egypte, puis en Jordanie pour parfaire sa formation militaire.

Il a participé à la seconde guerre civile soudanaise, l’un des conflits les plus longs et meurtriers du 20e siècle, dont le dernier épisode commence au Soudan du Sud en juin 1983, et se termine finalement en janvier 2005. A noter que le Soudan du Sud a également été le théâtre de la première guerre civile soudanaise de 1955 à 1972.

Il devient plus tard chef d’état-major adjoint des opérations des forces terrestres. À ce titre, il coordonne l’envoi des troupes soudanaises au Yémen, où elles participent à la coalition.

En février 2019, alors que les manifestations contre le régime d’Omar el-Béchir prennent une ampleur inédite, le dirigeant nomme le général Abdel Fattah al-Burhan inspecteur général de l’armée soudanaise.

Le 12 avril 2019, ce haut gradé jusque-là inconnu du grand public, prend la tête du Conseil militaire de transition, au lendemain de la chute d’Omar el-Béchir, renversé après des mois d’une vaste contestation populaire. Depuis, il dirige ce pays.

Le lundi 25 octobre, l’armée annonce l’arrestation de la plupart des dirigeants civils, dont le premier ministre Abdallah Hamdock.

Désormais, le général Abdel Fattah al-Burhan, qui était à la tête des autorités de transition avant qu’il n’annonce leur dissolution, incarne exclusivement un pouvoir militaire.

TRT Afrika