Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre. Photo : Inuka Dance Company

Par Kudra Maliro

Ce jeune de 23 ans est un danseur professionnel. A 8 ans déjà, il imitait des légendes américaines telles que Michael Jackson et Chris Brown, qui ont époustouflé leurs publics avec leurs danses au début des années 2000.

Dans l’Est de la République démocratique du Congo où les exactions contre les populations civiles sont devenues monnaies courantes, Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre qui mine cette région depuis des décennies.

"J’ai commencé ma carrière professionnelle de la danse contemporaine en 2016. J’ai été sélectionné pour faire mes études en danses traditionnelles et contemporaines d’Afrique à l’Ecole Sables au Sénégal pendant trois ans" a –t-il dit à TRT Afrika.

Kasolene et son groupe tentent de passer un message de paix via la danse. Ils donnent des spectacles dans des endroits publics comme les marchés, dans les rues de Goma pour divertir et sensibiliser une population traumatisée par les sifflets des balles et autres bruits d’armes de guerre.

"Mieux comprendre leurs émotions"

Le groupe de danse Inuka réunit une dizaine de jeunes passionnés de danse et qui y voient une forme de thérapie.

"Lorsque nous partageons des moments de danse avec des enfants qui ont subi des traumatismes, ils oublient, car la danse les aide à se dépasser et leur permet de penser à autre chose qu'aux atrocités de guerre qu'ils ont subies, surtout ceux (les enfants) du Nord-Kivu" a dit Abdoul Tambwe, un danseur du groupe Inuka Dance Company.

"Grâce à des séances de danse d'Inuka Dance Compagny, les enfants arrivent à mieux se connaître et à mieux comprendre leurs émotions. En dansant, ils expriment leurs ressentis corporels et émotionnels de manière ludique et créative. Les mouvements de danse leur permettent également de libérer les tensions physiques et de favoriser la circulation de l’énergie dans le corps" dit-il.

"Nos séances de danse sont thérapeutique pour les enfants. Elle les aide à développer la confiance en soi et l’estime de soi, parce que ce sont eux les futurs leaders du Congo" ajoute M. Tambwe.

Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre. Photo : Inuka Dance Company

"Etant qu’artiste, mon rôle est de partager un espoir et conscientiser notre peuple afin qu'on évite les conflits intercommunautaires qui ont couté la vie à plusieurs personnes" ajoute –t-il.

L’armée congolaise et ses alliés mènent, depuis des mois, des opérations dans l’Est de la RD Congo pour tenter de déloger les rebelles du M23 de la zone. Les combats ont fait des dizaines de morts parmi les civils et entrainé le déplacement de milliers d’autres.

Ces derniers ont trouvé refuge dans des camps de déplacés près de Goma.

Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre. Photo : Inuka Dance Company

"L’art n’a pas de frontière"

En 2022, la tension entre la RDC et son voisin du Rwanda s’est ravivée, emmenant la Communauté de l’Afrique de l’Est, à laquelle appartiennent les deux pays, à intervenir pour mettre fin aux agissements des groupes rebelles dans l’est du Congo et préserver la paix dans toute la région.

Défait en 2013, le M23, dont les combattants s'étaient réfugiés en Ouganda et au Rwanda, a repris s es activités militaires en 2022, reprochant à Kinshasa le non-respect de ses engagements.

La résurgence du M23, qui occupe plusieurs localités dans l'est du pays, a provoqué un regain de tension entre la RDC et le Rwanda.

Pour Kasolene, l’art n’a pas de frontière. Il assure n’avoir pas de problème avec d’autres pays malgré leurs désaccords avec la RDC.

Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre. Photo : Inuka Dance Company

Kasolene participe actuellement à un Festival de Danse qui se déroule à Goma avec plusieurs danseurs venus du Rwanda, Burundi et autres pays limitrophes de la RDC.

Ce festival de danse a pour but de promouvoir la cohabitation pacifique au sein de la population de la région des Grands et faire passer les messages de paix .

" Nous voulions montrer au monde que la RDC et le Rwanda sont deux pays frères et amis" déclare M. Batumike, l’organisateur du Festival de danse à Goma.

Il explique que les danseurs rwandais et congolais ont fait plus d’une semaine ensemble à Goma, s’entrainant ensemble et partageant la scène. "Cela vise à changer cette idée que nos peuples sont ennemis".

Kasereka Kasolene essaie, à travers son art, de faire oublier les atrocités de la guerre et faire passer des massages. Photo : Inuka Dance Company

La population congolaise est caractérisée par sa jeunesse ; 60 % des habitants du pays ont moins de 20 ans. Elle est estimée à 107 millions d'habitants en 2021, ce qui en fait le 14e pays le plus peuplé du monde.

Kasolene et son groupe prévoient de visiter des camps de déplacés près de Goma pour y enseigner la danse mais aussi aider les déplacés à surmonter les traumatismes liés au conflit.

"L'object est d'éviter que les enfants qui vivent dans ces camps ne finissent dans la rue. S’ils maîtrisent la danse, ils pourront se prendre en charge", confie –t-il.

"Nous tentons de vendre une image positive de la RDC via la danse et nous espérons que d’ici quelques mois, on ne parlera pas de l’Est du Congo comme une zone de conflit mais plutôt pour les merveilles qu’offrent la région. Nous sommes des artistes et des éducateurs de masse" conclut M. Kasolene.

TRT Afrika