Les tentatives précédentes pour réparer le système électrique nigérian n'ont guère donné de résultats positifs. Photo : AFP

Par Abdulwasiu Hassan

Le Nigeria a adopté une nouvelle loi qui permet aux gouvernements locaux et aux particuliers de produire, de transporter et de distribuer de l'électricité.

Le projet de loi, signé par le nouveau président du pays, Bola Ahmed Tinubu, le 9 juin, est d'une importance capitale à un moment où la majorité des quelque 200 millions de Nigérians souffrent depuis des années d'un approvisionnement en électricité peu fiable.

"C'est la dévolution du pouvoir", a déclaré le président Tinubu à propos de la nouvelle loi. "C'est notre contribution aux projets de développement que vous recherchez, et nous continuerons à prendre des mesures qui aideront notre peuple".

Ibrahim Danbatta, expert en énergie au Nigeria, considère que cette loi va changer la donne. "Cette loi va ouvrir le secteur de l'électricité", a-t-il déclaré à TRT Afrika.

Jusqu'à la signature de la loi, la Transmission Company of Nigeria (TCN) était entièrement détenue par le gouvernement fédéral du Nigeria.

Historique des réformes

La nouvelle loi est l'aboutissement de réformes juridiques progressives dans le secteur de l'électricité de la plus grande économie d'Afrique. Jusqu'à ce changement, la production, le transport et la distribution de l'électricité relevaient exclusivement de la défunte National Electrical Power Authority (NEPA).

Le président Tinubu a prêté serment le 29 mai en promettant d'améliorer les infrastructures. Photo : Reuters

La NEPA a été dissociée en plusieurs sociétés sous l'égide de la Power Holding Company of Nigeria lorsque la loi de 2005 sur la réforme du secteur de l'énergie électrique est entrée en vigueur sous le gouvernement du président de l'époque, Olusegun Obasanjo.

Ces sociétés comprennent six entités de production appelées "gencos", 11 sociétés de distribution appelées "discos" et une société de transmission appelée Transmission Company of Nigeria.

Dans le cadre de la réforme du secteur de l'électricité menée par le président Goodluck Jonathan, le gouvernement nigérian a cédé six sociétés de production et vendu jusqu'à 60 % de sa participation dans les 11 sociétés de distribution. À la fin du cycle de réforme, la distribution d'électricité était encore d'environ 4 000 mégawatts.

Vers 2021, le gouvernement nigérian du président Muhammadu Buhari a signé un accord de six ans avec Siemens AG pour porter la distribution d'électricité du pays à 11 000 mégawatts d'ici 2023. Cependant, la production d'électricité de pointe au Nigéria ne dépasse pas les 4 000 mégawatts.

Dispositions législatives

La loi sur l'électricité de 2023 permettra aux 36 États du Nigeria d'accorder à des entreprises privées ou à des particuliers des licences pour la production, le transport et la distribution d'électricité.

Ils devront respecter la réglementation de la Commission nigériane de régulation de l'électricité (NERC) concernant leur obligation sur la proportion d'énergie renouvelable qu'ils doivent avoir.

Au Nigeria, de nombreuses entreprises et de nombreux ménages dépendent de groupes électrogènes. Photo : Reuters

Les particuliers peuvent également produire jusqu'à 1 mégawatt d'électricité sans licence de la NERC ou du gouvernement de l'État.

L'idée est que le transport de l'électricité, qui relevait auparavant de la seule responsabilité de la Transmission Company of Nigeria, ne sera plus un monopole.

Toutefois, la loi ne prévoit pas la possibilité d'un transport interétatique de l'électricité, que ce soit par les États ou par des particuliers.

Tant qu'un État n'aura pas adopté sa loi sur l'électricité, le NERC continuera à superviser le secteur de l'électricité dans cette région.

Implications

Au-delà du simple fonctionnement, la nouvelle loi, si elle est correctement mise en œuvre, aura un impact profond sur le développement socio-économique de la plus grande économie d'Afrique, selon les experts.

Les petites entreprises ont tout à gagner d'une amélioration de l'approvisionnement en électricité au Nigeria. Photo : Reuters

L'un des effets de la nouvelle loi, selon les experts, est l'efficacité associée à l'économie de marché.

"Elle va permettre à un plus grand nombre d'acteurs clés d'investir davantage dans notre réseau de distribution, ce qui améliorera la qualité et la fourniture d'électricité au Nigeria", explique M. Ibrahim à TRT Afrika.

"En ce qui concerne les prix, ils seront compétitifs. Les tarifs seront moins élevés, grâce à la multiplicité des sources de production et d'approvisionnement.

Outre l'efficacité systémique, la nouvelle loi devrait créer des opportunités d'emploi pour un plus grand nombre de Nigérians.

"Si l'on considère la question en termes de création d'emplois, le fait d'avoir plus d'électricité va permettre d'ouvrir plus d'industries. Les gens auront plus d'emplois. De nouveaux acteurs clés de la production apparaîtront", explique M. Ibrahim.

De nombreuses entreprises dépendent de l'électricité au Nigeria. Photo : Reuters

Il souligne également que la nouvelle loi est une opportunité pour ceux qui fabriquent, vendent, achètent et utilisent des véhicules électriques, des tricycles, des motos et même des bicyclettes, de profiter de la hausse des prix des carburants résultant de la suppression des subventions.

"J'appelle à la mise en œuvre immédiate de cette législation pour que les Nigérians puissent commencer à en bénéficier. Le président a déjà fait sa part du travail. Il incombe désormais aux acteurs clés et aux autres parties prenantes de veiller à ce que la loi soit mise en œuvre dès que possible", déclare M. Ibrahim.

Au-delà de l'optimisme, il reste à voir quel type d'effet la nouvelle loi aura sur la quête du Nigeria pour une alimentation électrique fiable.

TRT Afrika