Le chef de l'Etat sénégalais, Macky Sall, a ordonné "l’ouverture d’enquêtes judiciaires immédiates et systématiques" après les manifestations qui ont éclaté jeudi 1er juin courant suite à la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme.
"Devant la gravité sans commune mesure des faits, le Président de la république a réitéré sa détermination à protéger la Nation, l’Etat, la République, ses valeurs, et ses fondements. Il a à cet effet ordonné l’ouverture d’enquêtes judiciaires immédiates et systématiques pour faire la lumière sur les responsabilités liées à ces évènements", rapporte un communiqué du conseil des ministres réuni mercredi, relayé par l'agence de presse sénégalaise.
Macky Sall "s’est incliné devant la mémoire des personnes décédées lors des incidents graves notés ces derniers jours, plus particulièrement, dans les régions de Dakar et de Ziguinchor", a indiqué la même source.
Il a "saisi l’occasion pour saluer le professionnalisme remarquable et la posture républicaine efficace des forces de défense et de sécurité qui ont permis de maitriser, malgré tout, la violence sans précédent des attaques malveillantes, et d’arrêter les actes de vandalisme et de grand banditisme relevés".
Sall condamne "fermement ces agressions caractérisées extrêmement graves contre l’Etat, la République et ses institutions et contre la nation sénégalaise à travers des violences humaines, des actes de saccages contre des biens publics et privés et des cyber-attaques contre des sites stratégiques du Gouvernement et des services publics vitaux, dont l’objectif était sans aucun doute de semer la terreur et de mettre à l’arrêt notre pays".
Le Président sénégalais "a demandé au Gouvernement de préparer un Mémorandum complet sur les décès, actes de vandalisme et défiance vis-à-vis de l’Etat perpétrés à l’occasion de ces manifestations".
Macky Sall annonce, par ailleurs qu'il s’adressera à la nation après le dialogue national en vue d’en "partager les conclusions".
"Au terme du dialogue national, le président de la République a informé qu’il s’adressera à la nation pour partager les conclusions et donner les grandes orientations qui permettront la consolidation de notre modèle démocratique et républicain", rapporte l'APS
Les propositions et recommandations définitives du travail des commissions du dialogue national doivent parvenir "avant le 25 juin 2023" au président Sall qui a "renouvelé son engagement à accompagner le travail des commissions du dialogue national afin de trouver, avec les acteurs impliqués, les compromis nécessaires et les consensus attendus sur toutes les questions prioritaires et majeures abordées".
Le dialogue national avec les forces vives de la nation, initié par le président sénégalais, pour des concertations sur la situation sociopolitique, la gestion des ressources pétrolières et gazières dont l’exploitation démarre au dernier trimestre de 2023, entre autres sujets, a été lancé le 30 mai dernier au palais de la République à Dakar.
Des personnalités politiques de la majorité et du pouvoir, des leaders d’organisations syndicales, du patronat et de la société civile ainsi que des guides religieux et coutumiers ont répondu à l’appel au dialogue lancé par le président Sall. La principale coalition politique Yewwi Askan WI et le front contre le 3ème mandat (F24) boycottent le dialogue.
Pour rappel, des manifestations ont éclaté jeudi 01 juin dans plusieurs localités du pays, notamment dans la capitale Dakar et à Ziguinchor (Sud), suite à la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme, et se sont poursuivies vendredi 02 juin.
Un bilan officiel fait état de 16 morts en 48 heures. Dans un communiqué, la Croix-Rouge a indiqué avoir secouru, entre jeudi et vendredi, près de 357 manifestants blessés, dont 78 cas graves. Au moins 500 personnes ont été interpellées lors des manifestations, a annoncé la police sénégalaise.
Dans la foulée des manifestations, le ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur (Maese) a annoncé la fermeture provisoire, à titre conservatoire, de ses consulats généraux à l’étranger à cause d’"agressions perpétrées" contre certaines missions diplomatiques et consulaires du pays à l'étranger.
Accusé de viol et menace de mort suite à une plainte déposée en février 2021 par une employée d’un salon de beauté, Ousmane Sonko a finalement été condamné à deux ans de prison ferme pour le délit de "corruption de la jeunesse", le tribunal ayant disqualifié les faits de viol et menace de mort.
L'opposant voit, ainsi, ses chances de se porter candidat à la présidentielle de février 2024 s'évaporer, puisque la loi sénégalaise interdit les candidatures à la magistrature suprême des personnes condamnées à des peines supérieures à six mois de prison ferme.