Les expulsions des migrants africains de l'Algérie vers le Niger s’intensifient au fil des années, alerte le programme d'assistance aux migrants Alarme Phone Sahara (APS).
Au moins 31 404 migrants ont été expulsés durant l'année 2024 vers la frontière nigérienne. En 2023, ce chiffre s'élevait à 26 031 personnes d'après la même source.
Interrogé par TRT Français, Chéhou Azizou Secrétaire Exécutif de l'association Jeunesse Nigérienne au Service du Développement Durable, explique cette situation par “le renforcement de la coopération entre les pays du Maghreb dans la lutte contre l’immigration clandestine”.
Les migrants en situation irrégulière “viennent de Libye, du Maroc et de la Tunisie et sont systématiquement dirigés vers la frontière nigérienne” dénonce Chehou Azizou.
APS déplore les conditions “inhumaines et arbitraires” dans lesquelles des opérations d'expulsion ont lieu. “Que ce soit en Algérie, au Maroc ou en Tunisie, beaucoup sont arrêtés sur leur lieu de travail, dans leurs domiciles ou dans la rue au cours des rafles”.
“On déplore les enfants qui sont ainsi séparés de leurs parents, les conjoints divisés, les femmes enceintes. Beaucoup arrivent dans un très mauvais état, malades, avec des blessures et fatigués, dans un profond dénuement”, déplore Chehou Aziz.
En avril dernier, les autorités nigériennes ont convoqué l’ambassadeur de l'Algérie à Niamey pour exprimer leur mécontentement par rapport à la “brutalité” et leur “manque d'humanité” envers les migrants, explique l’activiste des droits humains.
Pour le moment, la situation semble empirer et les Nigériens sont témoins des conditions de vie des personnes piégées par le “rêve européen”. Les pays du Maghreb sont le plus souvent des pays de transit, l’Europe étant la destination finale.
L'Algérie et l’ensemble des pays du Maghreb ont intensifié leur coopération dans la lutte contre les migrants clandestins, transformant le Niger, malgré lui, à devenir le principal pays d’accueil des refoulés.
La pression de l'UE
A l’observation, certains pays du Maghreb sont devenus des frontières de l’Union européenne du fait de nombreuses conventions les liant avec le vieux continent.
Le 16 juillet 2023 par exemple, la Tunisie et l’Union européenne ont signé un partenariat stratégique en vertu duquel l'UE devrait offrir à la Tunisie une enveloppe de 105 millions d'euros, afin de rapatrier 6 000 Subsahariens. La Tunisie a accepté de sous-traiter la surveillance des côtes européennes. Il en est de même de l’Egypte et de la Mauritanie. L'Algérie s’est désolidarisée de ce type de coopération avec l’UE, préférant gérer la problématique de la migration selon ses propres politiques.
Pour le moment, le Niger est devenu le principal réceptacle des migrants expulsés du Maghreb. “Le Niger a abrogé la loi criminalisant les activités liées au migrations clandestines, ceci pourrait expliquer pourquoi le pays est sollicité par les passeurs ou les pays du Maghreb pour expulser les clandestins”, explique Chehou Azizou d’Alarme Phone Sahara qui plaide pour une approche humaine et concertée de la migration.