Par Ferdinand Mbonihankuye
L’utilisation de parties d’animaux sauvages dans la médecine est un phénomène qui la peau dure au Burundi. Plusieurs tactiques illégales sont utilisées pour les tuer afin obtenir leurs peaux et leurs organes. La chasse et autres techniques de piégeage restent l’activité dominante dans les provinces situées près des forêts et des parcs nationaux.
Beaucoup n’hésitent pas à se livrer à des tactiques de chasse illégales tels que brûler des forêts, détruisant les habits naturels pour les contraindre sortir.
Une fois tués, les peaux et d'autres parties des animaux sont utilisées pour produire des médicaments traditionnels vendus sur le marché local. Ses produits sont très prisés par les Burundais.
Actuellement, plusieurs espèces dont les panthères, les pythons, les girafes, les antilopes, etc. sont en voie de disparition.
Une chasse effrénée inquiétante
Le Burundi est l'un des pays où le taux d'utilisation de la médecine traditionnelle est le plus élevé au monde.
Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 80 % des Africains ont recours aux formes traditionnelles de médecine pour répondre à leurs besoins en matière de soins de santé.
Dans les pays pour lesquels on dispose de données plus détaillées, le pourcentage de la population qui a recours à la médecine traditionnelle va de 90 % au Burundi et en Éthiopie, à 80 % au Burkina Faso, en République démocratique du Congo et en Afrique du Sud, à 70 % au Bénin, en Côte d'Ivoire, au Ghana, au Mali et au Rwanda, et à 60 % en Tanzanie et en Ouganda", précise l'OMS.
Mais il y a des inquiétudes au Burundi où certaines personnes ont recours à la chasse illégale d'animaux sauvages ainsi qu'à la déforestation à la recherche de remèdes traditionnels.
Rareté des espèces
Les tradipraticiens du Burundi soutiennent que les médicament composés d'organes de certains animaux sauvages notamment soignent des maladies telles que le diabète, le cancer, les maladies cardio-vasculaires, et sont, estiment-ils, efficaces contre le poison.
« Nous tuons seulement l'animal dont la peau est un médicament. Nous arrachons l'herbe qui nous est utile », affirme un groupe de tradipraticiens de Kayanza, l'une des 18 provinces du Burundi.
Mais même les concernés reconnaissent que les populations d'animaux et d'espèces végétales utilisées pour la médecine traditionnelle diminuent.
M. Ntakananirimana, un tradipraticien de la commune de Muruta a expliqué à TRT Afrika qu'il se déplace dans différentes forêts naturelles à la recherche de certaines herbes et et chasse des animaux afin d'obtenir leurs peaux.
"Pour avoir certaines plantes médecinales comme de l'Umugambare, l'Umuganzakivyeyi, l'Inkomamisozi (des espèces locales) et des peaux de de python, de cobra…Je suis obligé de me rendre en République Democratique du Congo puisque ces herbes et certains animaux ont disparu des forêts du Burundi, a confié ce tradipraticien de la province de Kayanza ».
Il n'est pas le seul à avoir fait ce constat. Ses pairs contacté à TRT Afrika ont affirmé avoir aussi noté la rareté de plusieurs espèces animales sur le territoire burundais. Certains oiseaux comme l'aigle et l’ibis sont introuvables, ont-ils dit.
Une peau d’un animal est vendue entre 500 et 1000 francs burundais (FBu) sur le marché burundais.
Un code de l'environnement non respecté
Le Burundi dispose d’un code de l’environnement qui encadre la chasse pour préserver la biodiversité, mais il est rarement respecté par les chasseurs. Dans ce pays, la chasse est considérée comme une activité traditionnelle.
Avant de pénétrer les réserves naturelles du Burundi, tout chasseur ou tradipraticien doit être muni d'une autorisation, souligne Abel Nteziryayo chargé de la protection de la réserve naturelle de la kibira.
Bien qu'il existe ces lois régissant la faune, la chasse et la protection de la biodiversité au Burundi, elles sont rarement respectées.
Sur place on note une quasi inexistence de mesures de protections de la faune et de la flore et certaines communautés locales n’accordent aucun répit aux animaux dont les habits sont fréquemment incendiés.
Des personnes interpellées
Fin septembre 2022, dans un village de Mpfunda en commune Muruta de la province kayanza, frontalière de la réserve naturelle de Kibira, dans le nord-ouest du pays, six (6) personnes soupçonnées d’avoir tué un chimpanzé ont été arrêtées. Ces individus ont été appréhendés alors qu’ils partageaient la viande de l’animal qu’il venait de tuer.
Abel Nteziryayo, chargé de la protection de la réserve naturelle de la Kibira, précise qu’ils ont commis un crime environnemental, le chimpanzé étant une espèce en voie de disparition.
« Si les tradipraticiens ont besoin de peaux de certaines espèces d'animaux, ils doivent demander une autorisation auprès du ministère en charge de l’environnement », a -t-il ajouté.
Le soutien local à la conservation de la nature a été considérablement miné; une décision qui, selon les experts, pourrait potentiellement précipiter l’extinction de diverses espèces. Il a aussi été noté récemment une augmentation de braconnage à des commerciales.
Ils soulignent également que sans alternatives viables aux médicaments traditionnels ou à leurs sources, la situation risque d'empirer.