Présidentielle 2023 en RDC :Moise  Katumbi en campagne. Photo : AFP

Sillonnant le pays à bord de son jet privé, filmé à pied ou à vélo au milieu de foules en liesse, l'homme, généralement coiffé d'un chapeau, mène sa campagne électorale comme il conduit ses affaires, sans rien laisser au hasard et en ne lésinant pas sur les moyens.

"Il y pensait depuis cinq ans, il a eu le temps d'organiser son plan de campagne", note un diplomate.

A la présidentielle de 2018, il n'avait pas pu se présenter.

Deux ans plus tôt, sous la présidence de Joseph Kabila, il avait été mis en cause dans deux affaires, l'une de spoliation immobilière, l'autre de recrutement supposé de mercenaires.

La condamnation à trois ans de prison que lui avait value la première a ensuite été annulée et la deuxième n'a pas eu de suites. Mais entre-temps, il était parti en Afrique du Sud, et n'était rentré de cet exil de fait qu'en 2019.

Privé d'élection, il avait apporté son soutien à Martin Fayulu, à qui la présidence avait échappé au profit de Félix Tshisekedi. Il a ensuite soutenu la coalition au pouvoir avant de s'en écarter fin 2022, en annonçant sa candidature à la présidentielle de 2023.

Dans les mois qui ont suivi, les ennuis sont revenus rôder autour de lui.

Un de ses conseillers, Salomon Idi Kalonda, a été arrêté fin mai, accusé de collusion avec les rebelles du "M23". Un autre proche, l'ancien ministre Chérubin Okende, a été assassiné en juillet, dans des circonstances non élucidées.

Un débat récurrent sur la "congolité" a par ailleurs été relancé, avec le retour sur le bureau de l'Assemblée nationale d'une proposition de loi visant à réserver aux Congolais nés de père et de mère congolais l'accès à certaines hautes fonctions.

Un texte semblant taillé sur mesure pour barrer la route à Moïse Katumbi, dont le père était un juif séfarade né à Rhodes, du temps où cette île grecque était sous domination italienne.

Ayant fui sa terre natale entre les deux guerres mondiales, celui-ci s'est installé à Kashobwe, dans le Haut-Katanga (sud-est), près d'un lac à la frontière zambienne, où il a lancé un commerce de poisson et où est né Moïse Katumbi, le 28 décembre 1964.

"Mon pays"

Après ses études secondaires, Moïse Katumbi démarre sa carrière d'entrepreneur dans les pêcheries, avec pour principal client la société minière publique Gécamines. Il développe et diversifie son entreprise dans l'agriculture, le transport, les services aux exploitants du cuivre et du cobalt.

Passionné de football, il devient en 1997 président du prestigieux "Tout Puissant Mazembe", club historique de son fief de Lubumbashi. Il s'implique, investit, dote le club d'un stade aux normes internationales, crée un centre de formation...

Marié, père de six enfants, catholique pratiquant et jouant régulièrement au tennis, Moïse Katumbi dit qu'il n'aime pas la politique et ses "mensonges".

Il plonge pourtant dans la politique en 2007, quand il est élu gouverneur de la riche province minière du Katanga, qu'il dirigera jusqu'en 2015.

En 2013, le réalisateur belge Thierry Michel lui a consacré un documentaire, "L'irrésistible ascension de Moïse Katumbi", qui a déplu à l'homme d'affaires.

Généralement décrit comme populaire, il y était plutôt présenté par certains intervenants comme populiste, distribuant le s dollars ici et là, et accusé d'avoir profité de sa position de gouverneur pour s'enrichir, ce qu'il dément.

Leader du parti "Ensemble pour la République", soutenu par quatre autres candidats qui se sont désistés en sa faveur, Moïse Katumbi met en avant ses réalisations au Katanga, avec construction de routes, d'écoles et développement de l'agriculture, pour affirmer qu'il saura gérer le pays tout entier.

Cette fois, sa candidature a bien été enregistrée puis validée par la Cour constitutionnelle, qui a rejeté un recours contestant sa nationalité congolaise. Le débat est toutefois loin d'être clos. A défaut de le traiter directement d'étranger, certains adversaires, dont Félix Tshisekedi, le classent parmi les candidats "des étrangers".

"Ils mentent!", lançait Moïse Katumbi lors d'un récent meeting, "je suis congolais, ce pays est mon pays".

AFP