Par Firmain Eric MBADINGA
A 58 ans, Ali Mahamane Lamine Zeine, le Premier ministre de transition nommé par la junte, est natif de la région de Zinder, au sud de Niger.
M. Zeine a été ministre des Finances sous Mamadou Tandja, qui a dirigé le pays de 1999 à 2010 après son retour à un régime civil.
Il était, jusqu'à sa nomination par la junte, directeur national de la Banque africaine de développement pour le Tchad, fonction qu’il a occupée quelques années plus tôt en Côte d'Ivoire et au Gabon.
Depuis le coup d'État du 26 juillet dernier, la situation au Niger est suivie dans le monde entier, mais surtout en Afrique.
'’Cette nomination va davantage conforter les nigériens qui sont favorables à la junte et qui vont estimer que la 'page Bazoum’ est définitivement tournée et que désormais, c'est une nouvelle ère qui s’ouvre’’, affirme, le Béninois Romarıc Badoussı, Docteur en science politique et relations internationales.
Ce spécialiste de la CEDEAO et de la gouvernance démocratique ajoute que cette nomination pourrait aussi avoir pour autre effet de ‘’démobiliser les derniers soutiens du président Bazoum’’.
S’agissant de la durée possible de la junte au pouvoir, le Dr Romarıc Badoussı pense que le choix porté sur Ali Mahamane Lamine Zeine, suppose que la junte a l’intention d’exercer le pouvoir de manière plus ou moins durable.
'’Un premier ministre est censé former un gouvernement qui exercera la réalité du pouvoir pendant un certain temps. C’est vrai que l’on parle pour le moment de premier ministre de transition, et quand on dit transition, cela suppose que le gouvernement en question sera là pour préparer l’avènement d’un autre gouvernement qui sera élu.’’ ajoute-t-il.
Priorité au peuple
La nomination de M. Zeine a été saluée par les soutiens du régime militaire mais suffira -t-elle à infléchir la position de la Cedeao? On en saura plus après le prochain sommet extraordianire des dirigeants des pays de la sous-région prévu le 10 août à Abuja, au Nigeria.
A Niamey, la capitale du Niger, les avis sont partagés.
Pour Issifou Issa, opérateur économique à Nıyamé, la nomination d'un chef de gouvernement par le régime militaire est une étape normale. ''Le choix du premier ministre du Niger, après ce que les autres ont appelé 'coup d'État' et que nous appelons 'une poursuite normale de la marche de notre pays', répond aux aspirations du peuple'', dit Issifou Issa à TRT Afrika.
'' C'est un homme d'expérience qui a déjà servi comme ministre des Finances. Il peut s'en sortir dans la gestion d'un Etat, et je pense qu'on peut lui accorder le temps de faire ses preuves.'', explique -t-il.
L'homme d'affaires nigérien suggère à la CEDEAO, le bloc régional, d'accorder la priorité au peuple et à ses besoins.
'' Les sanctions de certains pays de la CEDEAO ont entraîné des coupures d'électricité. Avec ce genre de mesures, c'est le peuple qui est en train de souffrir. Avec de telles méthodes, comment voulez-vous que ce peuple adhère à cette organisation?'', s'interroge le sexagénaire.
Une fuite en avant
La posture de Issa est à l'opposé de celle de Garba Soumaila. Ce dernier estime que la junte est jusqu'au-boutiste dans sa démarche''. À travers le nomination de ce 'soi-disant' Premier ministre, la junte veut peut-être mettre la communauté internationale, en l'occurrence la CEDEAO dos au mur. Je pense que c'est une fuite en avant. A la place de Zeine, je n'aurais pas accepté cette offre'', soutient Garba Soumaila.
Il croit que la désignation d'un Premier ministre par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) ne fera que motiver la CEDEAO à mettre en application sa menace d'intervenir militairement afin de rétablir le président Bazoum dans ses fonctions.
'’Dans ce cas précis, on s’aperçoit qu’il y a une divergence entre ce que veulent les putschistes et ce que leur demande la CEDEAO et la communauté internationale. La CEDEAO leur demande de remettre le pouvoir au président démocratiquement élu. À ce niveau, il y a un décalage qui ne sonne pas comme un message d’apaisement vis-à-vis de la communauté internationale ‘’, estime pour sa part le Dr Badoussı.
La nomination de Ali Mahamane Lamine Zeine en tant que premier ministre de transition au Niger intervient après l’expiration d’un ultimatum d'une semaine de la CEDEAO qui menace d'intervenir menace milliairement pour rétablir l'ordre constitutionnel.
La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) se réunir de nouveau en sommet extraordinaire le 10 août à Abuja, pour évaluer la crise politique au Niger.