Human Rights Watch (HRW) a accusé les forces armées du Burkina Faso, aux prises avec les groupes armés jihadistes, d'avoir "exécuté au moins 223 civils" dont au moins 56 enfants lors de deux attaques dans le nord du pays, dans un rapport publié jeudi.
"L'armée burkinabè a sommairement exécuté au moins 223 civils, dont au moins 56 enfants, dans deux villages le 25 février 2024. (...) Les soldats ont tué 44 personnes, dont 20 enfants, dans le village de Nondin et 179 personnes, dont 36 enfants, dans le village voisin de Soro", situés dans le district de Thiou (nord), affirme le rapport de cette ONG.
Les auteurs de l'enquête disent avoir interrogé 23 personnes par téléphone, dont 14 témoins des tueries, et vérifié des vidéos et des photographies partagées par des survivants.
Sollicitées, les autorités burkinabè n'ont pas immédiatement réagi à ce rapport. C'est samedi soir qu'elles ont publié un démenti dans communiqué du ministre de la Communication.
"Le gouvernement du Burkina Faso rejette et condamne fermement de telles accusations infondées", écrit dans le communiqué le ministre de la Communication, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo.
"Les tueries de Nodin et de Soro ont donné lieu à l'ouverture d'une enquête judiciaire" ajoute-t-il, en s'étonnant que "pendant que cette enquête est en cours pour élucider les faits et identifier leurs auteurs, HRW ait pu, par une imagination débordante, identifier les coupables et prononcer son verdict".
Le communiqué estime que "la campagne médiatique orchestrée autour de ces accusations démontre à souhait le dessein inavoué de ces auteurs qui est de jeter le discrédit sur nos forces combattantes engagées sur le champ d'honneur, au péril de leur vie, dans la sécurisation du territoire ainsi que la protection des populations et de leurs biens contre les attaques terroristes".
Les forces armées ne peuvent être "dans le même temps auteurs d'actes ignobles tels ceux allégués envers ces mêmes populations", affirme-t-il.
Selon le porte-parole, "toutes les allégations de violations et d'abus de droits humains rapportées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme font systématiquement l'objet d'enquêtes" suivies par le gouvernement et le Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme.
Les massacres dans les villages de Nondin et de Soro "ne sont que les derniers en date des tueries de masse de civils par l'armée burkinabè dans le cadre de ses opérations de contre-insurrection", a déclaré Tirana Hassan, directrice exécutive de HRW citée dans ce rapport. "L'échec répété des autorités burkinabè à prévenir et à enquêter sur de telles atrocités souligne pourquoi l'assistance internationale est cruciale pour soutenir une enquête crédible sur d'éventuels crimes contre l'humanité", a-t-elle ajouté.
Ouagadougou a suspendu pour deux semaines la BBC et Voice of America (VOA) pour avoir relayé le contenu du rapport de HRW. Cette suspension suit celles, temporaires ou définitives, prises à l'encontre de plusieurs autres médias étrangers, principalement français, depuis l'arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré en septembre 2022.
Le Burkina Faso est confronté depuis 2015 à des violences jihadistes attribuées à des mouvements armés affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique qui ont fait quelque 20.000 morts et plus de deux millions de déplacés internes.